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Le pardon, il ne le connaîtra pas

jeudi 28 juin 2007 (Date de rédaction antérieure : 28 mars 2024).

Au bout de la route, une succession de virages, le silence est à peine froissé par le ronronnement lointain des faucheuses. Allongés sous un antique tracteur, deux chats terminent leur sieste. Des poules, rousses, sont endormies à l’ombre d’un buisson. Le lichen donne aux pierres noires de somptueux reflets ocre. Lussaud est un hameau paisible du nord du Cantal.

Pourtant, derrière cette apparente tranquillité, les rancunes sont aussi solides que les murs des maisons, construites pour la plupart à la fin du XIXe siècle. Ces histoires, tout le monde les connaît au village. Mais elles étaient inscrites dans les traditions orales. Jusqu’au jour où Pierre Jourde s’en est inspiré pour son roman Pays perdu.

"On le sait, mais on n’en parle pas", explique Jean-Marc Morel, maire de Laurie, commune dont dépend le hameau. "Il a fait ressortir des choses vilaines. Et je n’ai trouvé personne pour me dire : "ce qu’il a fait, c’est bien"." Le premier magistrat précise sa pensée : "Lussaud existe pour les gens qui y habitent." Implantée depuis des générations dans ce hameau typique du Cézallier, la famille Jourde y possède plusieurs maisons. Et une ferme, exploitée par un agriculteur, neveu de l’un des hommes aujourd’hui mis en examen. A l’entrée du hameau, derrière la grille entrouverte, le nom de Jourde est gravé au fronton de trois caveaux, sur la vingtaine que compte le cimetière.

"RIEN À GAGNER"

"Ça nous fait mal", explique cette grand-mère à la porte de sa maison. Au bord des larmes, elle se souvient des "grandes fêtes que l’on faisait avant. Tout le monde se connaissait. Pierre venait jouer aux cartes". Sortant un mouchoir de sa blouse, elle essuie rapidement ses yeux rougis : "On ne sait pas pourquoi il a fait ça..." "Si on aime Lussaud, comme il l’a écrit, alors on prend les gens qui vont avec. Et on se garde bien d’écrire des choses. Nous n’avons rien à gagner avec cette histoire, contrairement à lui", affirme le maire. "Je défends les habitants de Lussaud. Ce ne sont pas des assassins. Qu’ils aient voulu l’engueuler, je comprends. Mais le village ne l’attendait pas de pied ferme. Certains habitants le vivent très mal, et l’ambiance est déplorable. Le pardon des habitants, il ne le connaîtra pas", ajoute-t-il.

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