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Slavoj Zizek @ Liberty Place / Occupy Wall Street (3) 

mardi 11 octobre 2011, par Slavoj Žižek

 Ce jour, en France, pas de devenir annoncé faute de loi assez forte pour maintenir la liberté d’expression d’informer en permanence sur la voie publique, contre l’illégitime engagement des accords franco-allemands sur le sauvetage monétaire et financier de l’Europe sans règlementation des banques, qui anticipent le renouvellement de la prochaine présidence pour la rendre impuissante aux dépens des ressources vitales des citoyens : les "indignés" sont radicalement réprimés sur la voie publique, qu’il s’agisse d’information à l’entrée des magasins ou sur les trottoirs ; seules les organisations peuvent obtenir le droit de manifester, pas les individus. C’est le moment où aux États-Unis la détermination du mouvement libre d’organisations bureaucratiques joue sur la fondation constitutionnelle des premier et quatrième amendements [1] pour installer le terrain révolutionnaire qui radicalisera les conditions exécutives du plan Volcker (promulgué en juillet 2010 l’échéance de sa réalisation est en 2012), et le retour local de l’emploi, l’éducation et la santé enfin pour tous, aux USA, et peut-être davantage, la création des biens communs fondamentaux échappant au marché.
 Malgré les manipulations médiatiques et la répression réactifs outre-atlantique on suit les événements dans un délire du temps hyperarborescent bourré d’énergie positive.
 
Pour introduire une confusion entre les ultra-réactionnaires et les révolutionnaires on peut ainsi lire, dans un blog du Washington Post qu’il est un journaliste pour inventer que Zizek lors de son speech à Zuccotti Plark à New York, le 5 octobre, aurait appelé les manifestants à rejoindre le Tea Party. On lit ailleurs dans certains tabloïds adressés aux intégristes chrétiens parmi la population pauvre, pour distraire des raisons de l’occupation et pour salir les activistes, mais encore pour justifier la répression, que le sexe et la drogue seraient le véritable objet de ces rassemblements. Cependant dans quatre grande villes américaines une répression radicale a eu lieu cette nuit, et surtout à Boston (MA) où grâce au livestream vidéo on a pu voir la police anti-émeute attaquer massivement le camp d’occupation pacifique de Greenway Park, bastonnant plus violemment que les autres activistes les vétérans ralliés au mouvement de la paix, et malgré leur âge déchirant leurs drapeaux. Le maire Thomas M. Menino a déclaré le lendemain qu’il n’y aurait pas de tolérance de la désobéissance civile dans cette ville. [2] Pourtant, certains activistes héroïques reviennent s’y montrer.
 Passons sur les inconnus ou connus dont nous n’avons pas ou pas encore traduit les interventions, soit que nous ne les ayons pas trouvées décryptées en anglais, soit que nous soyons incertains du droit de les reproduire, telle l’intervention de Naomi Klein, publiée dans The Nation (nous attendons la réponse à notre demande d’autorisation).
 Un certain nombre de célébrités, comme dit McKenzie Wark, sont passées dire leur mot parmi les occupants de Zuccotti Park anciennement baptisé Liberty Park, et rebaptisé Liberty Place pour célébrer l’occupation, non pour clamer un leadership mais pour déclarer leur solidarité et apporter leur médiatisation afin qu’elle contribue à celle du mouvement.
 Voici l’intervention publique sulfureuse de Slavoj Žižek pas vraiment Tea-Party invité à s’exprimer au forum de la "place de la liberté" à 18h, le 9 octobre 2011. 23è jour d’occupation continue de l’espace public par le mouvement Occupy Wall Street, occupation maintenant répandue dans la plupart des grandes villes américaines, sous les variations adaptées de son intitulé selon sa ville, après avoir rallié plusieurs syndicats de travailleurs et des organisations caritatives multiples... Et même une personnalité politique leader du parti démocrate comme Nancy Pelosi, ancienne présidente du sénat majoritairement démocrate qui avait inauguré la présidence d’Obama... Contraste.
Merci #OWS.

Cet article, après Occupy Wall Street / Occuper Wall Street et Déclaration de Noam Chomsky solidaire de l’occupation de Wall Street, est le troisième de la série consacrée par la RdR au mouvement d’occupation public développé depuis le 17 septembre 2011 aux USA, contre l’État des entreprises, la dérèglementation du capital, et le système financier.

Première partie

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[ Début raccord selon Impose Magazine — * lien source des logos en Post Scriptum : Ils disent que tous nous sommes des perdants, mais les véritables perdants sont là-bas à Wall Street. Ils ont été renfloués par milliards avec notre argent. Nous sommes appelés socialistes, quand en fait le socialisme c’est toujours entre les riches [ quand en fait c’est déjà le socialisme pour les riches ]. Ils disent que nous ne respectons pas la propriété privée, mais la propriété privée qui a été détruite par le krach financier de 2008 a été plus affectée que si chacun d’entre nous ici l’avait détruite nuit et jour pendant des semaines. ] (...) La propriété privée qui a été détruite par le krach financier de 2008 a été plus affectée que si chacun d’entre nous ici l’avait détruite nuit et jour pendant des semaines. Ils vous disent que nous sommes des rêveurs. Les véritables rêveurs sont ceux qui pensent que les choses peuvent se poursuivre indéfiniment de la façon dont elles sont. Nous ne sommes pas des rêveurs. Nous sommes le réveil d’un rêve qui préparait un cauchemar [ qui virait au cauchemar [3] ]. Nous ne sommes pas en train de détruire quoi que ce soit. Nous sommes seulement en train de témoigner comment le système se détruit lui-même. Tous nous connaissons des scènes classiques de dessins animés telle : la voiture [ le chat [4] ] atteint un précipice, mais elle [ il ] continue à marcher, ignorant le fait qu’il n’y ait rien dessous. Seulement quand elle [ il ] regarde vers le bas et le remarque, elle [ il ] tombe. C’est ce que nous faisons ici, nous disons aux gars là-bas à Wall Street : « Hé, regarde vers le bas ! » (Acclamation)

En avril 2011, le gouvernement chinois a interdit à la télévision, au cinéma, et dans les romans, toute histoire contenant une réalité alternative ou un voyage dans le temps. C’est un bon signe pour la Chine. Cela signifie que les gens rêvent toujours à des alternatives, aussi faut-il interdire ce rêve. Ici nous ne pensons pas à l’interdiction, parce que le système du pouvoir a supprimé jusqu’à notre aptitude à rêver. À regarder les films que nous voyons tout le temps, il est aisé d’imaginer la fin du monde, un astéroïde qui détruit toute vie sur terre, etc. Mais vous ne pouvez pas imaginer la fin du capitalisme. Donc que faisons-nous ici ? Laissez-moi vous raconter une vieille blague des temps communistes.

Un gars d’Allemagne de l’Est avait été envoyé pour travailler en Sibérie. Il savait que son courrier serait lu par les censeurs. Alors il avait dit à ses amis : établissons un code ; si la lettre que vous recevez de moi est écrite à l’encre bleue, ce que je dis est vrai ; si elle est écrite à l’encre rouge, c’est faux. Après un mois ses amis ont une première lettre. Tout est en bleu. Cette lettre dit : tout est merveilleux ici ; les magasins sont pleins de bonne nourriture ; les cinémas montrent de bons films occidentaux ; les appartements sont grands et luxueux ; la seule chose que vous ne pouvez pas acheter c’est l’encre rouge.

Voilà comment nous vivons. Nous avons toutes les libertés que nous voulons. Mais ce qui nous manque, c’est l’encre rouge, la langue pour articuler notre non-liberté. La façon dont on nous apprend à parler de liberté et de la guerre contre le terrorisme et ainsi de suite falsifie la liberté. Et c’est ce que vous faites ici : vous nous donnez à tous de l’encre rouge.

Il y a un danger. Ne tombez pas amoureux de vous-mêmes. Nous passons un bon moment ici, mais n’oubliez pas : les carnavals surviennent à bon compte, ce qui importe c’est le jour d’après ; lorsque nous devrons revenir à une vie normale. Y aura-t-il des changements alors ? Je ne veux pas vous mettre en mémoire ces jours, vous savez, du genre : « Oh, nous étions jeunes, c’était magnifique. » Rappelez-vous que notre message de base est : nous sommes autorisés à réfléchir à des alternatives. La règle n’est pas respectée et nous ne vivons pas dans le meilleur des mondes possibles, seulement il y aura un long chemin à parcourir. Il y a des questions vraiment difficiles qui nous attendent. Nous savons ce que nous ne voulons pas. Mais que voulons-nous ? Quelle organisation sociale peut remplacer le capitalisme ? Quel type de nouveaux dirigeants désirons-nous ?

Rappelez-vous : le problème ce n’est pas la corruption ni la cupidité. Le problème c’est le système qui vous pousse à renoncer. Ne vous méfiez pas seulement des ennemis, mais aussi des faux amis qui travaillent déjà pour diluer ce processus. De la même manière que vous obtenez du café sans caféine, de la bière sans alcool, de la crème glacée sans matière grasse, ils vont essayer d’obtenir une protestation morale inoffensive. Ils pensent ... [ L’insert raccord selon la retranscription de Impose Magazine : (...) une protestation morale inoffensive. Un processus décaféiné. Mais la raison pour laquelle nous sommes ici est que nous en avons assez d’un monde où recycler les cannettes de coke, où faire la charité à deux dollars, ou encore acheter un cappuccino chez Starbucks dont le 1% qui va aux enfants dénutris du tiers monde suffit à nous faire ressentir bons. Après l’externalisation du travail et de la torture, après que les agences de mariage sous-traitent maintenant notre vie amoureuse, nous pouvons voir que pendant un bon moment nous avons également autorisé l’externalisation de notre engagement politique. Nous voulons revenir. ] Mais la raison pour laquelle nous sommes ici est que nous en avons assez du monde où recycler les cannettes de coke [ ... ]

Seconde partie


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[ ... ] Starbucks cappuccino [5]. Où le 1% va chez les enfants dénutris du monde. C’est assez pour nous ressentir bons, après l’externalisation du travail et de la torture. Après que les agences matrimoniales maintenant sous-traitent jusqu’à notre vie amoureuse, quotidienne.

Relevé de Mic


Nous pouvons constater que pendant longtemps nous avons également laissé notre engagement politique externalisé. Nous voulons revenir. Nous ne sommes pas communistes. Si le communisme signifie le système qui s’est effondré en 1990, rappelons-nous qu’aujourd’hui ces communistes sont les plus efficaces des capitalistes impitoyables. En Chine, aujourd’hui, il y a un capitalisme encore plus dynamique que le capitalisme américain, sauf qu’il n’a pas besoin de démocratie. Ce qui signifie, quand vous critiquez le capitalisme : ne cédez pas de vous-mêmes au chantage d’être contre la démocratie. Le mariage entre la démocratie et le capitalisme est terminé.

Le changement est possible. Alors, que considérons-nous possible aujourd’hui ? Il suffit de suivre les médias. D’une part en matière de technologie et de sexualité tout semble possible. Vous pouvez aller sur la lune. Vous pouvez devenir immortel en biogénétique. Vous pouvez avoir des rapports sexuels avec des animaux ou n’importe quoi. Mais regardez les domaines de la société et l’économie : presque tout est considéré comme impossible. Vous voulez augmenter les impôts un peu pour les riches, ils vous disent que c’est impossible, nous perdrions la compétitivité. Vous voulez plus d’argent pour les soins de santé, ils vous disent : impossible, cela signifierait un État totalitaire. Il y a quelque chose qui ne va pas dans un monde où vous êtes promis immortel mais ne pouvez pas dépenser un peu plus pour les soins de santé. Peut-être est-ce cela ? Définir nos priorités directement ici : nous ne voulons pas du niveau de vie, nous voulons de meilleures conditions de vie. Le seul sens dans lequel nous sommes communistes, c’est que nous avons de l’attention pour ce qui nous est communal. Les communes de la nature. Les communes de ce qui est privatisé par la propriété intellectuelle. Les communes de la biogénétique. Pour cela, et seulement pour cela, il faut se battre.

Le communisme a totalement échoué. Mais maintenant les problèmes communaux arrivent. Ils vous disent là que nous ne sommes pas des Américains ; seulement les fondamentalistes conservateurs qui prétendent être vraiment américains doivent se rappeler quelque chose. Qu’est-ce que le christianisme ? C’est l’Esprit Saint. Qu’est-ce que le Saint-Esprit ? C’est la communauté égalitaire des croyants qui sont liés par l’amour pour l’autre, et qui ne possèdent que leur propre liberté et responsabilité de le réaliser. En ce sens, le Saint-Esprit est ici maintenant. Et là-bas à Wall Street il y a des païens qui adorent des idoles blasphématoires. Ainsi, tout ce dont nous avons besoin est de la patience. La seule chose que je crains, c’est qu’un jour nous soyons tout simplement de retour à la maison et qu’ensuite nous allions nous rencontrer une fois par an, boire de la bière, en nous souvenant avec nostalgie du bon temps que nous avions eu ici. Promettons-nous que ce ne sera pas le cas.

Nous savons que souvent les gens désirent quelque chose, mais qu’ils ne le veulent pas vraiment. N’ayez pas peur de ce que vous désirez vraiment. Merci beaucoup ! [6]

Part 1

… [ The beginning cut transcripted from Impose Magazine : They are saying we are all losers, but the true losers are down there on Wall Street. They were bailed out by billions of our money. We are called socialists, but here there is always socialism for the rich. They say we don’t respect private property, but in the 2008 financial crash-down more hard-earned private property was destroyed than if all of us here were to be destroying it night and day for weeks. ] ...2008 financial crash more hard earned private property was destroyed than if all of us here were to be destroying it night and day for weeks. They tell you we are dreamers. The true dreamers are those who think things can go on indefinitely the way they are. We are not dreamers. We are awakening from a dream which is tuning into a nightmare. We are not destroying anything. We are only witnessing how the system is destroying itself. We all know the classic scenes from cartoons. The cart reaches a precipice. But it goes on walking. Ignoring the fact that there is nothing beneath. Only when it looks down and notices it, it falls down. This is what we are doing here. We are telling the guys there on Wall Street – Hey, look down ! (cheering).

In April 2011, the Chinese government prohibited on TV and films and in novels all stories that contain alternate reality or time travel. This is a good sign for China. It means that people still dream about alternatives, so you have to prohibit this dream. Here we don’t think of prohibition. Because the ruling system has even suppressed our capacity to dream. Look at the movies that we see all the time. It’s easy to imagine the end of the world. An asteroid destroying all life and so on. But you cannot imagine the end of capitalism. So what are we doing here ? Let me tell you a wonderful old joke from communist times.

A guy was sent from East Germany to work in Siberia. He knew his mail would be read by censors. So he told his friends : Let’s establish a code. If the letter you get from me is written in blue ink ,it is true what I said. If it is written in red ink, it is false. After a month his friends get a first letter. Everything is in blue. It says, this letter : everything is wonderful here. Stores are full of good food. Movie theaters show good films from the West. Apartments are large and luxurious. The only thing you cannot buy is red ink.

This is how we live. We have all the freedoms we want. But what we are missing is red ink. The language to articulate our non-freedom. The way we are taught to speak about freedom war and terrorism and so on falsifies freedom. And this is what you are doing here : You are giving all of us red ink.

Remember : the problem is not corruption or greed. The problem is the system that pushes you to give up. Beware not only of the enemies. But also of false friends who are already working to dilute this process. In the same way you get coffee without caffeine, beer without alcohol, ice cream without fat. They will try to make this into a harmless moral protest. They think (??? unintelligible). But the reason we are here is that we have enough of the world where to recycle coke cans…

There is a danger. Don’t fall in love with yourselves. We have a nice time here. But remember : carnivals come cheap. What matters is the day after. When we will have to return to normal life. Will there be any changes then. I don’t want you to remember these days, you know, like - oh, we were young, it was beautiful. Remember that our basic message is : We are allowed to think about alternatives. The rule is broken. We do not live in the best possible world. But there is a long road ahead. There are truly difficult questions that confront us. We know what we do not want. But what do we want ? What social organization can replace capitalism ? What type of new leaders do we want ? ... [ See the beginning insertion in the second Part ]

Part 2

[ (Alternate insertion suggested from Impose Magazine) : they will try to make this into a harmless, moral protest. A decaffienated process. But the reason we are here is that we have had enough of a world where, to recycle Coke cans, to give a couple of dollars for charity, or to buy a Starbucks cappuccino where 1% goes to third world starving children is enough to make us feel good. After outsourcing work and torture, after marriage agencies are now outsourcing our love life, we can see that for a long time, we allow our political engagement also to be outsourced. We want it back.. ] ….Starbucks cappuccino. Where 1% goes to the world’s starving children. It is enough to make us feel good. After outsourcing work and torture. After the marriage agencies are now outsourcing even our love life, daily [ Back to the insert ].

Mic Check


We can see that for a long time we allowed our political engagement also to be outsourced. We want it back. We are not communists. If communism means the system which collapsed in 1990, remember that today those communists are the most efficient ruthless capitalists. In China today we have capitalism which is even more dynamic than your American capitalism but doesn’t need democracy. Which means when you criticize capitalism, don’t allow yourselves to be blackmailed that you are against democracy. The marriage between democracy and capitalism is over.

The change is possible. So, what do we consider today possible ? Just follow the media. On the one hand in technology and sexuality everything seems to be possible. You can travel to the moon. You can become immortal by biogenetics. You can have sex with animals or whatever. But look at the fields of society and economy. There almost everything is considered impossible. You want to raise taxes a little bit for the rich, they tell you it’s impossible, we lose competitivitiy. You want more money for healthcare : they tell you impossible, this means a totalitarian state. There is something wrong in the world where you are promised to be immortal but cannot spend a little bit more for health care. Maybe that ??? set our priorities straight here. We don’t want higher standards of living. We want better standards of living. The only sense in which we are communists is that we care for the commons. The commons of nature. The commons of what is privatized by intellectual property. The commons of biogenetics. For this and only for this we should fight.

Communism failed absolutely. But the problems of the commons are here. They are telling you we are not Americans here. But the conservative fundamentalists who claim they are really American have to be reminded of something. What is Christianity ? It’s the Holy Spirit. What’s the Holy Spirit ? It’s an egalitarian community of believers who are linked by love for each other. And who only have their own freedom and responsibility to do it. In this sense the Holy Spirit is here now. And down there on Wall Street there are pagans who are worshipping blasphemous idols. So all we need is patience. The only thing I’m afraid of is that we will someday just go home and then we will meet once a year, drinking beer, and nostalgically remembering what a nice time we had here. Promise ourselves that this will not be the case.

We know that people often desire something but do not really want it. Don’t be afraid to really want what you desire. Thank you very much !

Slavoj Žižek

Today Liberty Plaza had a visit from Slavoj Zizek
principalement d’après ce décryptage anglophone mis en ligne par Occupywallst.org

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Traduction rapide par Louise Desrenards pour La RdR, le 10 octobre 2011. Quelques adaptations syntaxiques sont volontaires pour éclairer l’entendement du texte, chanté, par une personnalité ne négligeant pas de recourir aux ambiguïtés et aux paradoxes d’un dispositif de contraste aux extrêmes, dialectique/post-dialectique. Autre chose est le point de vue complexe donné par les sujets alternant entre le nous et le vous, où jamais le philosophe ne manipule par une fusion illusoire de son propre statut avec celui d’un américain. Il est toujours l’immigré internationaliste.

Cette version en français est librement reproductible accompagnée du lien actif de la source :
http://www.larevuedesressources.org/spip.php?article2140

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Une autre retranscription anglophone du discours de Slavoj Žižek parue plus tard (pendant que je traduisais la première version mise en ligne dans le site du mouvement) et présentée par Sarah Shin dans les blogs de l’éditeur Verso est présentée comme la version intégrale (?) du discours ; où l’on peut en effet retrouver des chaînons manquants et des passages inédits. Mais aussi des différences évidentes pour un relevé des mêmes passages. Enfin, la syntaxe dans une tradition écrite paraît loin de la diction scandée qui structure l’intervention orale vivante. Il peut s’agir de feuillets initiaux ou a posteriori remis par l’auteur pour publier dans ce blog d’éditeur ?

Slavoj Žižek at Occupy Wall Street : “We are not dreamers, we are the awakening from a dream which is turning into a nightmare” :

Don’t fall in love with yourselves, with the nice time we are having here. Carnivals come cheap—the true test of their worth is what remains the day after, how our normal daily life will be changed. Fall in love with hard and patient work—we are the beginning, not the end. Our basic message is : the taboo is broken, we do not live in the best possible world, we are allowed and obliged even to think about alternatives. There is a long road ahead, and soon we will have to address the truly difficult questions—questions not about what we do not want, but about what we DO want. What social organization can replace the existing capitalism ? What type of new leaders we need ? The XXth century alternatives obviously did not work.

So do not blame people and their attitudes : the problem is not corruption or greed, the problem is the system that pushes you to be corrupt. The solution is not “Main street, not Wall street,” but to change the system where main street cannot function without Wall street. Beware not only of enemies, but also of false friends who pretend to support us, but are already working hard to dilute our protest. In the same way we get coffee without caffeine, beer without alcohol, ice-cream without fat, they will try to make us into a harmless moral protest. But the reason we are here is that we had enough of the world where to recycle your Coke cans, to give a couple of dollars for charity, or to buy Starbucks cappuccino where 1% goes for the Third World troubles is enough to make us feel good. After outsourcing work and torture, after the marriage agencies started to outsource even our dating, we see that for a long time we were allowing our political engagements also to be outsourced—we want them back.

They will tell us we are un-American. But when conservative fundamentalists tell you that America is a Christian nation, remember what Christianity is : the Holy Spirit, the free egalitarian community of believers united by love. We here are the Holy Spirit, while on Wall Street they are pagans worshipping false idols.

They will tell us we are violent, that our very language is violent : occupation, and so on. Yes we are violent, but only in the sense in which Mahathma Gandhi was violent. We are violent because we want to put a stop on the way things go—but what is this purely symbolic violence compared to the violence needed to sustain the smooth functioning of the global capitalist system ?

We were called losers—but are the true losers not there on the Wall Street, and were they not bailed out by hundreds of billions of your money ? You are called socialists—but in the US, there already is socialism for the rich. They will tell you that you don’t respect private property—but the Wall Street speculations that led to the crash of 2008 erased more hard-earned private property than if we were to be destroying it here night and day—just think of thousands of homes foreclosed...

We are not Communists, if Communism means the system which deservedly collapsed in 1990—and remember that Communists who are still in power run today the most ruthless capitalism (in China). The success of Chinese Communist-run capitalism is an ominous sign that the marriage between capitalism and democracy is approaching a divorce. The only sense in which we are Communists is that we care for the commons—the commons of nature, of knowledge—which are threatened by the system.

They will tell you that you are dreaming, but the true dreamers are those who think that things can go on indefinitely they way they are, just with some cosmetic changes. We are not dreamers, we are the awakening from a dream which is turning into a nightmare. We are not destroying anything, we are merely witness how the system is gradually destroying itself. We all know the classic scene from cartoons : the cat reaches a precipice, but it goes on walking, ignoring the fact that there is no ground under its feet ; it starts to fall only when it looks down and notices the abyss. What we are doing is just reminding those in power to look down...

So is the change really possible ? Today, the possible and the impossible are distributed in a strange way. In the domains of personal freedoms and scientific technology, the impossible is becoming increasingly possible (or so we are told) : “nothing is impossible,” we can enjoy sex in all its perverse versions ; entire archives of music, films, and TV series are available for downloading ; space travel is available to everyone (with the money...) ; we can enhance our physical and psychic abilities through interventions into the genome, right up to the techno-gnostic dream of achieving immortality by transforming our identity into a software program. On the other hand, in the domain of social and economic relations, we are bombarded all the time by a You cannot ... engage in collective political acts (which necessarily end in totalitarian terror), or cling to the old Welfare State (it makes you non-competitive and leads to economic crisis), or isolate yourself from the global market, and so on. When austerity measures are imposed, we are repeatedly told that this is simply what has to be done. Maybe, the time has come to turn around these coordinates of what is possible and what is impossible ; maybe, we cannot become immortal, but we can have more solidarity and healthcare ?

In mid-April 2011, the media reported that Chinese government has prohibited showing on TV and in theatres films which deal with time travel and alternate history, with the argument that such stories introduce frivolity into serious historical matters—even the fictional escape into alternate reality is considered too dangerous. We in the liberal West do not need such an explicit prohibition : ideology exerts enough material power to prevent alternate history narratives being taken with a minimum of seriousness. It is easy for us to imagine the end of the world—see numerous apocalyptic films -, but not end of capitalism.

In an old joke from the defunct German Democratic Republic, a German worker gets a job in Siberia ; aware of how all mail will be read by censors, he tells his friends : “Let’s establish a code : if a letter you will get from me is written in ordinary blue ink, it is true ; if it is written in red ink, it is false.” After a month, his friends get the first letter written in blue ink : “Everything is wonderful here : stores are full, food is abundant, apartments are large and properly heated, movie theatres show films from the West, there are many beautiful girls ready for an affair—the only thing unavailable is red ink.” And is this not our situation till now ? We have all the freedoms one wants—the only thing missing is the red ink : we feel free because we lack the very language to articulate our unfreedom. What this lack of red ink means is that, today, all the main terms we use to designate the present conflict—’war on terror,’ "democracy and freedom,’ ’human rights,’ etc—are FALSE terms, mystifying our perception of the situation instead of allowing us to think it. You, here, you are giving to all of us red ink.

(Comparer les deux versions retranscrites donne un point de vue intéressant sur les différences d’écoute engagée qui peuvent être faites d’après une même référence vidéo à quelques fragments manquants près en début et en fin, ou selon d’y avoir assisté en temps vivant ou différé).

P.-S.

Nancy Pelosi répond pour ABC News, le 9 octobre 2011 :

Dans le compte-rendu publié sur le site de ABC on peut lire :

« Mme Pelosi a ajouté que l’échec du TARP [7], communément utilisé pour désigner le sauvetage des banques, afin d’ajouter des liquidités sur le marché du Main Street [8], alimente l’animosité des Américains envers Wall Street. 

"Lorsque nous l’avons fait [ décider de recourir au TARP ], l’idée était que ce serait un capital disponible et que Main Street bénéficierait des ressources largement distribuées à Wall Street", a déclaré Mme Pelosi. "Cela n’est pas arrivé. Les gens sont en colère." »

À la question précise de savoir si elle soutient le mouvement Occupy Wall Street, au contraire du président républicain du Sénat, Cantor, qui a stigmatisé le mouvement et appelé à l’empêcher, elle répond "oui", précisant :

« "Je soutiens le message à l’establishment, qu’il s’agisse de Wall Street ou de l’establishment politique et le reste, que le changement doive se produire", a déclaré Mme Pelosi dans une interview exclusive pour "Cette Semaine" de Christiane Amanpour, dans le cadre des Nouvelles de la chaîne ABC. "Nous ne pouvons pas continuer sur un chemin [ dans un sens ] qui n’est pas pertinent pour leur vie [ celle du 99% ]." » et elle affirme que les gens de ce mouvement ont le droit de s’exprimer (référence et recours répété au premier amendement de la constitution américaine sous lequel les activistes eux-mêmes se légitiment d’occuper et d’informer leur occupation critique).

Elle renforce sa position en déclarant une seconde fois et sans réserve contextuelle que le mouvement peut compter sur son soutien.

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* Les photos en logo sont des recadrages de photographies extraites
de Impose Magazine.

Notes

[1Traduction du premier amendement de la constitution des USA : Le Congrès ne fera aucune loi concernant l’établissement d’une religion ou interdisant son libre exercice ; ni qui restreigne la liberté de parole, ou de la presse, ou le droit des gens de s’assembler paisiblement et d’adresser des pétitions au gouvernement pour la réparation des griefs.
Le quatrième amendement : Le droit des citoyens d’être garantis dans leurs personnes, domiciles, papiers et effets, contre les perquisitions et saisies, ne doit pas être violé, et aucun mandat ne sera délivré, sinon sur la cause probable, corroborée par serment ou affirmation solennelle, et en particulier décrivant l’endroit à être recherché, et les personnes ou choses à saisir.
En France contre le jacobinisme politique des lois et des tolérances nous disposions du devoir d’insoumission et de la désobéissance civile rétablissant la légitimité du recours individuel. Depuis 1989 ce droit exprimé sous la forme d’un devoir a été révoqué des droits de l’homme en annexe de la Ve constitution, par François Mitterrand à la demande des législateurs européens.

[2Plus de 100 arrestations de personnes destinées aux fiches policières et para-militaires et peut-être à la qualification de "terroristes", par la police bostonnienne (Massachusetts), résultent de ce nettoyage nocturne au bras de fer et à coups de bâtons à Greenway Park.

[3À lire la version dans Impose Magazine, il y a certainement une coquille dans la retranscription notée ici, il s’agirait — c’est logique et m’avait d’ailleurs posé un problème — non pas de "tuning" mais de "turning" et par conséquent "virant au" plutôt que "préparant" — pour respecter une des polysémies de "tuning". Peut-être s’agit-il dans Impose Magazine d’une version retranscrite de l’enregistrement mais enfin en si bonne syntaxe qu’elle ne correspond pas rigoureusement à la diction en Live, et en tous cas mise en ligne plus tard que dans le site Occupywallst.org, d’où je suis immédiatement repartie — dans un réflexe activiste des plus fraîches nouvelles, et volontariste, et également pour lier ce site plutôt qu’un autre. Mais version pouvant correspondre aux notes de Zizek (il tient des papiers à la main pendant une partie de son speech), en tous cas crédible du point de vue de la source, vu la référence des personnes informées dans les photographies, comme Astra Taylor (réalisatrice de deux documentaires avec Zizek).

[4Même annotation désignant une probable coquille dans la version de Occupycallst.org, non pas "cart" le chariot ou la voiture, mais "cat" --- dans Impose Magazine, — le chat... les deux figures étant possibles dans la référence aux dessins animés existants.

[5- Starbucks Corporation est une chaîne internationale de cafés basée à Seatle (État de Washington) qui se targue d’une éthique du développement de ses producteurs et de leur contexte social et écologique.

[6« Last Note :
This is only a part of the entire speech he gave today, and if it was recorded in its entirety we’d be very glad to have a copy for transcription purposes.
(Thank you to everyone who offered transcripts, we had multiple offers) ». Dernière note : Ceci est seulement une partie du speech qu’il [ Žižek ] a donné aujourd’hui, et s’il a été entièrement enregistré nous serions très contents d’en avoir une copie à l’effet de la retranscription. (Merci à chacun de ceux qui nous ont offert une retranscription, nous avons reçu de nombreuses offres).

[7TARP — Troubled Asset Relief Program — est, selon Wikipedia "un programme du gouvernement des États-Unis pour acheter des actifs et des capitaux propres des institutions financières afin de renforcer le secteur financier, et qui a été constitutionnalisé sous la forme d’une loi par le président américain George W. Bush le 3 Octobre, 2008" (in extremis avant sa succession par le président Obama, le 4 novembre suivant) alors que la crise financière en plein développement menaçait gravement les détenteurs d’mmobilier sous crédit ; programme qui fut donc requis pour répondre à la crise des subprimes quelques mois plus tard, la même année.

[8Le Main Street Program (tenant son nom symbolique — la rue principale — de ladite rue où siègent les organismes concernés à New York), est un programme gouvernemental chargé de la régulation financière et de la relance des activités économiques et commerciales et des services à but non lucratif, au service de la population des États parmi lesquels New York, en recourant aux fonds des State Housing Trust Fund Corporation — dont celui de New York : The New York State Housing Trust Fund Corporation (HTFC - fondé en 1985).

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