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De l’obsolescence absolue et définitive de toutes les déclarations anciennes et récentes des droits de l’homme 

lundi 1er mai 2006, par Pierre Bongiovanni

DE LA NÉCESSITÉ DE S’INVENTER D’AUTRES « DECLARATIONS », OU NOUS OUBLIANT NOUS MÊMES, NOUS POURRIONS NOUS DEDIER A L’INVENTION DE L’AUTRE.

SCOLIE 1

Plusieurs milliers de jeunes femmes, en provenance d’Europe de l’Est, sont « attendues » pour « travailler » dans les maisons closes allemandes, implantées aux abords des stades de la Coupe du Monde 2006 de foot ball. Prostitution, hooliganisme, corruption, guerres médiatiques, merchandising mondial, police high-tech : rien ne manquera pour tenter de conjurer et de ralentir l’implosion sociale occidentale. A priori les supporters sont d’accord.

SCOLIE 2

Chaque jour des milliers de jeunes Africains tentent, par tous les moyens imaginables, de rejoindre les côtes européennes pour trouver un travail. A priori les entreprises et les peuples d’Europe n’en veulent plus. Les pauvres « d’ailleurs » constituent un danger concret qu’il convient de régler par la guerre (administrative, cynique, et mortifère bien sûr).

SCOLIE 3

Tidiane N’Diaye, économiste-statisticien, anthropologue franco-sénégalais, et auteur de l’Eclipse des dieux : « La colonisation n’a fait que prendre le relais de l’esclavage, du fait qu’au XIXe siècle, les économies agricoles étaient en totale perte de vitesse. D’où l’abandon du système esclavagiste au profit d’un système économique beaucoup plus actuel, plus développé. (...) il convient de reconnaître que ces abolitions devaient beaucoup plus à l’économique qu’à la morale. Par la suite, les industries de transformation, engendrées par la nouvelle économie, ont eu besoin de matières premières se trouvant dans le sous-sol ou sur le sol africain. On allait passer ainsi de l’énorme ponction de la traite, à l’occupation coloniale du continent noir pour organiser le pillage de ses richesses, parfois même avec l’appui de l’Eglise (...).
Le Capitalisme féodal qui submerge désormais le continent chinois réalise lui la prouesse de cumuler simultanément les deux dynamiques de développement : esclavagisme et colonisation intérieure, asservissement des populations , pillage de ses propres ressources, et colonisation communautariste de la planète.

SCOLIE 4

« Il est certain que se coltiner la misère, comme vous dites, c’est entrer dans le discours qui la conditionne, ne serait-ce qu’au titre d’y protester. Rien que dire ceci me donne position - que certains situeront de réprouver la politique. Ce que, quant à moi, je tiens pour quiconque exclu » (Jacques LACAN, Télévision, Paris, Seuil, 1974, p. 25).

SCOLIE 5

Commentant les chutes de fécondité ici, les hausses de fertilité ailleurs, les flux et les transits de population, les démographes prévoient à terme une Afrique anéantie, une Amérique hispanisée et chrétienne, une Europe asiatisée et musulmane.

SCOLIE 6

« nous serions (...) comme ces animaux sauvages hébergés dans ces parcs animaliers avec leurs repas distribués à heure fixe ; à tourner en rond, allant et venant, malheureux et contrariés de leur état mais confusément, ne comprenant pas ce qui les travaille ; (....) et qui , s’étonnant de ne pas s’éprouver heureux d’une vie si ménagée, et mettant leur malaise sur le compte d’une erreur névrotique, voudraient s’en réformer en lisant des magazines de psychologie, en s’inscrivant aux thérapies de groupe qu’on leur propose, en essayant le travail sur soi de la pensée positive. » (Baudoin de Bodinat, La vie sur terre, p. 38)

SCOLIE 7

« L’autre : celui qui me permet de ne pas me répéter indéfiniment »
(Jean Baudrillard, La transparence du mal).
« Une créature des profondeurs au cerveau minimal erre longtemps avant de trouver un point où se fixer. Dès qu’elle l’a trouvé, elle survit en se dévorant elle-même. Et ce qu’elle dévore d’abord, c’est son propre cerveau. Ce minimum de matière grise, qui ne lui servait qu’à trouver son lieu, elle n’en a plus besoin, donc elle le dévore. Je me demande si l’espèce humaine n’est pas en train de suivre le même parcours. »
(Jean Baudrillard, Les Exilés du dialogue. Entretiens, Galilée, 2005).

SCOLIE 8

« Il semble que rien dans ce que nous avons vécu ces dernières années, ne nous autorise à parler. Le doute par rapport à ses propres paroles se produit chaque fois que la distinction entre le public et le privé perd de son sens. »
Giorgio Agamben, Moyens sans fin, Notes sur la politique, Rivages poche, p. 132

SCOLIE 9

« la chose créée

en ce qu’elle est ne vaut rien

car sitôt existante

elle n’est plus

qu’un mouvement après

vers son délabrement

qu’une vaine imitation du geste

qui l’a fait naître

et qu’elle ignore

un mensonge bougé

elle n’importe que naissante »

Jean Michel Bruyère, Acedia 1, Sens & Tonka, p. 27

SCOLIE 10

Par défaut de tout, les médias, miroirs déformants de la société de maintenant, triturent le monde et le langage à la manière des hardeurs du cinéma mondial porno.

Certes ils bandent fort et longtemps mais leurs performances n’ont heureusement rien à voir, disent-ils humblement, avec quoi que ce soit des magies de l’Amour.
Les gens de média, eux, tentent de nous faire croire qu’ils incarnent les mouvements de la pensée alors qu’ils ne rendent lisible que la frivolité des opinions publiques.

SCOLIE 11

Le savoir et la connaissance, contribuent, par un étrange retournement de sens, à l’édification de l’ignorance. Ils ne valent désormais que comme compléments à la marchandise culturelle mondialisée.

SCOLIE 12

Nous sommes des ruminants.

Nous cheminons depuis 50 ans au bord d’un précipice.

Nous n’avons aucune idée de cet Autre qui nous attend de l’autre côté.

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