« La principale maladie de la planète, c’est l’homme. »
Paul Émile Victor
« Je me demande quelquefois s’il n’aurait pas mieux valu que l’évolution s’arrête au niveau des papillons… »
Hubert Reeves
« Seul parmi les animaux, l’homme a façonné son propre environnement. Paradoxalement, il a également été le seul à créer ainsi les facteurs de sa propre destruction. »
Ernesto Sabato
« L’homme est un miracle sans intérêt. »
Jean Rostand
Le même Monde, mais inversé, où nous ne serions plus dominants mais dominés par une autre espèce de grande taille, où nous devrions fuir, nous cacher, ne plus respirer quand l’autre se manifeste, où l’éviction au mieux, l’extinction au pire seraient nos seules issues. Un enfer. Mais le seul monde surnuméraire et qui nous surpasse est celui du microcosme ou des organismes unicellulaires, comme ces bactéries qui nous menacent de leurs 250 nanomètres chacune, ou des prions et des virus, réplicateurs (se reproduisant à l’identique) mais sans métabolisme.
Un autre Monde représenté par un quelconque animal…, nous sommes à tel point persuadés du bien fondé de notre positionnement sommital et glorieux au-dessus du Vivant que l’hypothèse fait rire, semble infantile, ridicule, décalée, si dérangeante qu’elle ne peut relever que de la fiction, du grotesque ou du surréalisme. On pourrait ainsi transposer le film d’Hitchcock Les oiseaux. Pour les autres espèces, nous apparaissons comme l’équivalent des oiseaux d’Hitchcock. Cette analogie fut judicieusement reprise par Tezuka dans un manga intitulé : Demain, les oiseaux, réflexion impitoyable sur le devenir humain une fois les oiseaux devenus bipèdes pyromanes et groupe dominant sur Terre, semant partout la dévastation de la terre brûlée. Notre spécialité. Dans cette parabole de la dégénérescence humaine, Tezuka nous montre sa vision fataliste d’une Planète condamnée par les inepties d’une espèce, l’oiseau de malheur, s’étant tyranniquement arrogé tous pouvoirs.
Le bonobo, l’orang-outang ou le gorille, l’un d’eux comme espèce invasive et de fourvoiement au sein d’une société humaine d’un effectif modeste, ça vous irait ? Il s’agirait finalement du même monde, toujours avec Homo sapiens surdoué, mais sans pétrole, non plus dopé par les énergies fossiles, la pétrochimie qui fit la révolution verte et la multiplication des pains (ce type d’âge d’or, ou plutôt de toc, les bricoleurs du monothéisme l’avaient prévu…), mais cette fois à hauteur de seulement un ou deux petits milliards. Avec quasiment les mêmes inventions, les mêmes avancées inventives, le même progrès, à quelques techniques près. Mais sur une Planète envahie, pour telle ou telle raison, par le fléau d’une autre grande espèce, disons les bonobos par sympathie et proximité spécifique. Imaginons nos plages et nos cités encombrées de bonobos, imaginons les bonobos envahissant la cité, s’infiltrant, se fourvoyant pacifiquement partout. 7 milliards de bonobos intrus … Ce n’est pas la Planète des singes, c’est notre Planète subissant l’inquisition insupportable du surnombre d’une autre espèce. Imaginons 7 milliards de rhinocéros, des rhinocéros envahissant nos hypermarchés, nos pitoyables animaleries. Notre impact sur les fragiles écosystèmes planétaires est celui d’éléphants dans un magasin de porcelaine. Voilà ce que nous imposons à la biosphère, sans nous en rendre compte un seul instant, convaincu que cela est dans la raison écologique. Eh bien non, ce n’est qu’une erreur, c’est même l’erreur par excellence.