{} {} {} {} Cher monsieur, [3]
{} {} {} {} Devant l’horreur du mauvais tour pris par la campagne électorale à travers des événements tragiques qui captent les Une des médias, interrompant le développement de l’argumentaire politique, et que certains bien situés dans l’institution pour s’en servir n’ont pas manqué d’instrumenter dans la cohérence de leurs exploits antérieurs, une campagne précédente il y a tout juste dix ans nous revient justement en mémoire. Un fait divers moins meurtrier, sans mort d’homme, resta néanmoins célèbre d’avoir influencé l’opinion électorale jusqu’à l’émergence de Jean-Marie Le Pen au second tour des Présidentielles. Il y a de quoi craindre aujourd’hui l’influence de l’horreur sur le pouvoir en place avant les élections, et c’est l’idée de sa reconduction qui est devenue aussi redoutable qu’une gouvernance de Le Pen aujourd’hui.
Au terme de plusieurs discussions antérieures avec une camarade, au sujet de votre campagne, et de l’intérêt qu’elle suscite pour nous, il semble que le moment soit venu de vous adresser nos pensées critiques républicaines, selon nos sensibilités respectives. Cela bien sûr concerne l’aspect public des communautarismes, dans la république qui est la nôtre, laïque par définition constitutionnelle, sur lesquels il conviendrait d’être plus précis que répondre : qu’"étant des affaires privées cela ne concerne pas l’État" et donc exclure non pas le débat, car il a déjà eu lieu, mais d’ignorer les contradictions et la division sociales qui se développent cachées sous la législation autiste qui a prescrit le sujet, par une législation inadéquate sur le vêtement plutôt que sur le respect des contenus républicains — l’obligation d’honorer tous les enseignements pour ceux qui vont à l’école publique, par exemple. Nous voyons bien aujourd’hui à quel point ce serait simple, mais bien trop simple pour affronter la division sociale et la terreur, et la désinformation opportuniste et les exploits — certes nécessaires mais d’autant plus fulgurants et démonstratifs qu’on se demande pourquoi ils n’eurent pas lieu avant le troisième meurtre de l’épouvantable série, — à laquelle elles donnent lieu.
A fortiori pour trouver des solutions qui l’empêchent.
Sachez que je suis parmi vos soutiens attentifs bien que je n’appartienne à aucune organisation politique ni même au NPA que je vais citer. Mais je souhaiterais d’autant plus vous interpeller sur l’intolérance, que je compte peut-être créditer de mon vote votre candidature et peut-être convaincre quelques amis de le faire avec moi. Si.
La laïcité est un devoir républicain, mais la république doit protéger tous ses citoyens indifféremment de leur croyance privée, pourvu qu’elle ne soit pas meurtrière d’autrui et respecte les droits civiques réciproques. En aucun cas la défense de la république laïque ne doit devenir exclusive ni intégriste, sauf à être déviée des fondements par et pour la liberté. L’intégrisme c’est l’intégrisme, il n’y en a pas de divers, c’est une part intégrante du monstre. Sous la défense intégriste de la laïcité il y a le racisme « choisi ».
Souvenez-vous du foulard musulman noué sur la nuque d’Ilhem Moussaïd, la candidate du NPA qui revendiquait pour les femmes le droit d’avorter — droit que vous-même êtes amené à défendre face aux restrictions de l’accès au remboursement des soins proposées par Marine Le Pen, — elle n’était donc pas créationniste (pas d’intégrisme monothéiste sans créationnisme, donc elle n’était pas une musulmane intégriste, et de plus elle défendait un programme laïque dans un parti qui n’était pas communautariste)... Elle fut injustement traitée d’« islamiste », et tellement harcelée dans sa propre organisation politique qu’elle finit par la quitter pour former avec d’autres camarades, nullement musulmanes, une association indépendante comprenant également des hommes, et aussi féministe et laïque que son programme de candidate électorale l’avait été au sein du NPA. Où des militants de ce courage ne sont pas présents dans certaines élections régionales, le Front National passe, parce que ceux qui auraient pu l’empêcher ne sont pas allés voter, faute de se sentir représentés...
Ce qu’il advint du NPA, sinon le découragement de Besancenot qui finit par capituler sous la pression de Krivine, revenant estampiller de sa garantie démocratique l’organisation tout juste orpheline de Bensaïd à laquelle il ne s’était jamais intéressé auparavant, pour plaire à des alliances dont vous étiez à l’encontre de Moussaïd : la division puis la réduction, une sorte de liquidation de ce parti alors qu’il était plein de jeunes espoirs.
Nous avons beaucoup perdu tous en tant que républicains du centre à la gauche le jour où cette fille a du quitter les rangs d’une organisation politique républicaine officiellement reconnue au oin de ouvoir présenter des candidats pour l’Assemblée Nationale. Le jour où forcée d’adopter l’uniforme des anciens colonialistes elle a gardé sa dignité en préférant le choix de son exclusion à celui de sa soumission. Elle était parfaitement autodéterminée et non envoyée par ses frères ou par son père. Dire l’inverse est abject de négationnisme de ses actes associés et institutionnels engagés dans la république pour tous.
Ignoreriez-vous que les trotskistes de la 4è Internationale furent déterminants dans le printemps égyptien ? Que tout commença par le soutien activiste des syndicalistes des grandes grèves de l’industrie du textile en Égypte le 6 avril 2008, et que telle fut la source du mouvement de la jeunesse du 6 avril à l’origine du premier rendez-vous de la place Tarhir ?
Ignorez-vous que l’activiste avancée de ce mouvement trotskiste fut Asmaa Mahfouz, une jeune étudiante tout juste sortie d’une école de commerce pour se mettre au travail dans une entreprise d’informatique, qui au terme de trois vlogs autodéterminés appelant à la retrouver sur la place le 25 janvier 2011, pour faire cesser une fois pour toutes et jusqu’à la victoire la répression sauvage et liberticide des travailleurs et du peuple égyptien de la pauvreté, réussit à être ralliée. Unie avec le mouvement des bloggers animé par Ghonim « Nous sommes tous des Khaled Saïd », éponyme du jeune programmeur qui avait été massacré pour des raisons politiques par la police d’Alexandrie en juin 2010, elle portait et porte le foulard musulman tout en s’opposant à la réalisation politique de la charia en place de démocratie en Égypte. L’ignoreriez-vous ou le savez-vous, en préférant ne pas vous y intéresser, comme le problème qui rôde en France depuis la querelle sur la laïcité où l’aspect et les actes ont té confondus au cri contradictoire de « Pas d’amalgame ! » ? Certes le vêtement peut être un drapeau politique, mais n’appartient-il pas justement à la république des Lumières de rétablir le langage du discernement, en distinguant le signe et la personne, au lieu de signifier les deux à la fois pour anéantir l’individu concerné aux yeux de son voisin ?
http://en.wikipedia.org/wiki/Asmaa_Mahfouz
Vlog Asmaa Mahfouz
From Tahrir to Wall Street
Voir de telles personnalités tracer leur destin collectif fait honte à ceux qui ont exclu du NPA Ilhem Moussaïd, qu’en tant que femme je salue de nouveau ici.
Ignorez-vous que la demande du pouvoir et des partis français — dont les socialistes et les écologistes — était purement xénophobe et raciste, ou ignorante, quand le port du foulard de Moussaïd en tant que musulmane n’était en rien différent du foulard noué sur la nuque des femmes juives qui militent dans les colonies israéliennes en Palestine, ainsi que celui des mères de famille et cadres de l’école de Toulouse dont les enfants furent massacrés. Voyez les images... autrement qu’interprétées a priori.
Pourquoi ce foulard noué signe de religion est-il accepté en France quand il est porté par des juives — éventuellement intégristes — alors qu’il ne l’est pas s’il est porté par des arabes — éventuellement non intégristes ?
Sommes-nous devenus ignares ou ne savons-nous plus penser dialectiquement par nous-mêmes, en raisonnant sur l’actualité politique et les signes de l’information, et par conséquent, même les plus pertinents d’entre nous — la gauche populaire des masses — seraient-ils devenus victimes de la désinformation ? Ce n’est pas à vous qu’on pourrait conseiller de retourner à l’école ou d’admettre que vous puissiez être devenu ordinairement xénophobe et couramment raciste, car vous ne paraissez pas l’être, loin de là, mais il reste qu’aujourd’hui nous soyons dans l’axe d’un « racisme choisi » conforme au concept d’« immigration choisie » de ceux qui nous gouvernent, et que vos déclarations si généreuses se voudraient-elles n’y échappent pas.
Il ne vous choque pas que les victimes du tueur de Montauban et de Toulouse ayant d’abord été des noirs puis des arabes, on n’ait pas commencé à évoquer un crime raciste mais forcément un réseau mafieux dans l’armée qui aurait donné lieu à un règlement de compte, par le fait de membres qui en auraient été exclus ou des marchands d’arme ? On évoqua pourtant des néonazis qui auraient été renvoyés, mais l’hypothèse du crime raciste ne surgit qu’après le meurtre des élèves du collège confessionnel israélite de Toulouse ! Auparavant, les gens de couleur victimes du tueur n’étaient que de probables délinquants : ça ne vous choque pas ? Et sur cette base vous ne croyez pas que d’autres crimes racistes pourraient avoir lieu avant le premier tour des Présidentielles ou une immense récupération, car finalement le tueur fut peut-être repéré bien avant son troisième crime collectif en série, et aurait pu être empêché avant l’excès de racisme lisible dans le crime le plus monstrueux qu’il ait commis, celui contre les enfants d’une école confessionnelle juive, qui a interrompu la campagne électorale à juste titre ? Seul le racisme meurtrier contre des juifs peut animer la réprobation en masse dans un pays du racisme ordinaire contre les colonisés et les anciens colonisés. C’était le sens du Discours sur le colonialisme d’Aimé Césaire.
Parce que la mortification prédit la mort.
Vous contenterez-vous de culpabiliser sur vos succès telle la place de la Bastille dimanche, à cause des meurtres atroces qui eurent lieu le lendemain, et de refouler les paroles justes que vous aviez lancées comme l’insurrection civique, pour retourner à la noirceur électorale dont nous ne réchapperons pas si un candidat comme vous commence à laisser toute la place à ses adversaires, pendant qu’ils se publient auprès des corbillards — corbillards dont ils sont indirectement mais certainement responsables par les actes et les propos qu’ils ont tenus depuis deux ans, pour se radicaliser à la droite du Front National à force de le plagier pour lui voler ses voix ?
Vous voulez à votre tour nous désespérer de voter pour vous ?!
Halal / Kasher pour des Chrétiens ? Imaginez donc de quoi on prétend accabler les chrétiens sinon de leur propre racisme, et quand vous parlez de la seule différence de prier pour demander pardon d’enlever une vie, oui pourquoi pas... Mais enfin il y a une question matérialiste simple derrière tout ça, c’est qu’en réalité il s’agit d’un problème de commerce et de nouveaux profits. Car s’il est vrai que depuis toujours les communautés concernées ont eu la boucherie qui leur convenait sans que cela ait posé de problème social à l’ensemble du peuple républicain depuis quelques lustres. Que les chrétiens ne répugnent pas à manger de la viande saignante, voir l’apprécient, peut se dissocier du fait que le vin représente le sang à la messe. Car s’il est vrai que la viande de boucherie ordinairement proposée dans les supermarchés, et dans la plupart des boucheries non estampillées par une religion aujourd’hui, ne contienne plus de sang — à l’évidence de la cuisson et de la coupe... c’est que la généralisation soudaine de l’égorgement pour toute la boucherie aujourd’hui est due à une nouvelle exploitation du sang. La viande destinée à tout le monde est égorgée non par des Imams ni des rabbins mais par des abatteurs pour être saignée, en vue d’un commerce du sang des bêtes — la charcuterie et la nourriture d’autres animaux d’élevage ou domestiques, et peut-être même en pharmacologie, pourquoi pas et davantage, dans le cadre du grand marché. Or les chrétiens — et des agnostiques ou athées — pourraient réclamer le sang des bêtes parce que la plupart d’entre eux le consommèrent — le consommeraient encore et l’apprécient — avec la viande, dans leur propre nourriture.
Si choquant cela pourrait-il paraître aux yeux des végétariens ou des communautés religieuses qui y répugnent, ce point montre à quel point la raison civique n’était pas celle du racisme cynique lancé par madame le Pen, contre les arabes, mais le fait qu’elle ne trouve plus de la viande saignante dans sa boucherie du coin non Halal, même si elle ne va pas à la messe. Or c’est le Président lui-même qui a lancé le mot-clé à double entrée raciste, disant que les gens avaient le droit d’être informés sur le Halal et le Kasher lorsqu’ils achetaient de la viande. Alors qu’il s’agissait de ramener le problème à une simple question de possibilité du choix selon le goût — certains le considèreraient-ils de mauvais goût — des traditions culinaires des différentes cultures. Il est aussi raciste que Marine Le Pen et pour s’en dédouaner n’a pas hésité à avancer la religion juive ’par souci d’équité civique’, par là cumulant l’effet médiatique populiste des deux racismes, en quête du plein de la masse électorale pluri-confessionnelle en France, en réalité humiliant les uns par les autres et les renvoyant dos à dos, sauf les chrétiens et les ’laïques’ à y choisir leur cible ?!
Franchement il vaudrait la peine de faire une enquête pour éprouver les preuves d’où va le sang des bêtes égorgées dans les abattoirs non rituels, et l’on arriverait loin des religions. Ce qui éviterait de relancer des affaires racistes entre communautés.
Alors pourquoi reprendre les termes à la lettre ou dans l’esprit de Marine Le Pen, et du pouvoir qui la plagie, qui comprend des idéologues des nouvelles idées de l’extrême-droite compatible avec le néo-libéralisme ? Pourquoi chaque fois que l’on devrait parler de marché, on place la religion ? À quoi cela sert-il, d’après vous, sinon à créer la confusion qui permet de dominer en ayant l’air d’être un redresseur d’ordre, comme notre président et ses ministres savent si bien le faire en nous emmenant autoritairement et médiatiquement dans le mur ?
Nous célébrons la seconde Commune de Paris à laquelle nous devons tant, mais en même temps qu’elle nous est si proche nous sommes loin du moment où Edouard Vaillant devait combattre les religieux pour réquisitionner les écoles afin d’innover l’école publique, quand ensuite des prêtres pour se venger dénoncèrent Eugène Varlin qui en avait été un des principaux activistes syndicalistes, à ceux qui allaient lui crever les yeux et le lyncher. Nous devons savoir aujourd’hui que les deux premières nuits d’occupation de Zuccotti Park, par les premiers activistes publics du mouvement OWS, des chrétiens militants contre la pauvreté furent appelés en renfort par des activistes non croyants, afin de dormir sur place, et qu’ils en furent ensuite chaleureusement et sans honte remerciés dans les blogs. Certes cela n’arrange pas le sectarisme républicain français qui commence à se pétrifier or justement, ne serait-il pas temps de lui rendre vie en le faisant évoluer par la tolérance fraternelle ?
Un dernier point : je tiens à signer que je suis athée et si jamais je fus baptisée un jour sans en tenir compte ce fut comme catholique. Mes parents sont morts en ne voulant pas de sacrements religieux, de même concernant mes grands parents. Ma famille est généralement matérialiste. Mais il ne faut pas oublier que deux religions se partagent la culture du martyr et nous savons lesquelles, sinon comment pourrions-nous comprendre l’endurance du soulèvement tunisien comme celui du soulèvement égyptien — où deux communautés martyres intégrant leurs laïques immergées payèrent de leur sang le commencement et la poursuite de la révolution ? Car je parle des mouvements activistes non violents, pas des guerres.
Quant aux catholiques, je ne vois pas pourquoi ils seraient pires que les autres sinon parce qu’ils auraient réhabilité les femmes en même temps que les esclaves ? Les religions si "on s’en fiche" — comme moi, et comme vous j’imagine — : laissons les vivre dans leurs droits de cité sans les exposer au risque.
Où la question du voile à l’école posa un problème, si mes souvenirs sont bons, et la raison principale pour laquelle Elisabeth Badinter (dont je ne défends pas toutes les positions, ni surtout pas celle que je vais citer, mais femme que je respecte globalement de ne s’être pas départie du radicalisme laïque et instituant de son grand-père, Edouard Vaillant lui-même, malgré sa richesse), réclama avec d’autres l’interdiction du voile, qui fut sa première erreur. Le problème était que les filles qui portaient le voile dans l’école publique avaient une interdiction communautaire de suivre certains enseignements dans l’école laïque où d’autre part elles revendiquaient d’être intégrées. Dans ce cas, bien sûr, ce qu’il pouvait être concevable de ne pas admettre pour qui revendiquait l’accès à l’école gratuite républicaine, ou, puisque la scolarisation est obligatoire, de ne pas avoir à le faire admettre dans le cadre d’une scolarisation confessionnelle correspondant à la pratique sociale de la croyance en cause — ce qui est parfaitement légal en France, si coûteux cela serait-il pour les communautés ou les individus — c’était le refus de suivre des enseignements : mais en aucun cas le port du voile.
Bien sûr, je suis d’accord avec vous sur le principe commun que les contenus de l’enseignement public et son organisation sociale ne puissent être modifiés par une religion, dans un pays où nous sommes fiers que l’église soit séparée de l’État : mais justement, la grande idée de la laïcité ne fut-elle l’objectif de n’exclure personne et d’intégrer ? On lui a fait jouer le rôle inverse à propos du voile « islamique ». Pour ma part je refuse de considérer le voile autrement que comme un vêtement traditionnel, serait-il arbitrairement choisi en signe critique par celles qui l’arborent dans notre société aujourd’hui.
Commençons par arrêter la guerre chez les autres et nous cesserons de la fomenter parmi nous : Halte à la guerre !
Que nous apporteraient donc les étrangers s’ils nous ressemblaient ? Un miroir de notre même ? La reproduction mortifère de nos cellules à l’identique en prolifération anormale ? C’est de la force de la différence et de l’altérité dans la confrontation assumée, avec ce qui ne nous ressemble pas, que vient l’intelligence commune et l’inspiration du monde. La plus forte des cultures du monde immigré dans l’hexagone des années 60 a brillé de tous les feux de la postmodernité internationale, elle est aujourd’hui rétrécie comme un confetti esseulé, fossilisé après la fête d’il y a longtemps. C’est en France que ça s’est passé et en France que plus rien ne passe.
Le monstre est déjà là nous devons lui faire face. Courage, et debout ! Ne capitulez pas ou « je » n’irai pas voter ! À vos prochains meetings au son de votre voix joyeuse de la Bastille !
Bien cordialement...