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7 février 2013, par Raymond Penblanc
Depuis quelques jours il rentre de plus en plus tard. Hier c’était sur le coup des sept heures. Et ce soir il était plus de huit heures. Inquiète de ne pas le voir arriver, je suis allée le chercher à l’arrêt du bus, et il n’a pas pu s’empêcher de se gausser de ma jalousie de lionne, ou de tigresse puisqu’il me laisse le choix. C’est peu dire que j’apprécie mal son ironie. Est-ce de l’ironie d’ailleurs (...)
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16 octobre 2012, par Raymond Penblanc
Elle avait passé une nuit éprouvante, ne trouvant le sommeil que peu avant l’aube, et encore, pour des rêves poisseux qui lui avait laissé une vague nausée et imprimé les plis de l’oreiller sur la joue. Bien que la porte-fenêtre du séjour fût restée ouverte durant toute la nuit, la température de l’appartement n’avait guère baissé depuis la veille. S’étant levée avec le jour, comme à son habitude, elle (...)
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19 décembre 2012, par Raymond Penblanc
Rarement le printemps se montre aussi en avance. D’habitude il faut le prendre par la main et l’aider à faire ses premiers pas. Mais depuis quelques jours il y a de la douceur dans l’air, un peu plus de vert dans les arbres, et depuis hier, merveille, on entend le coucou. Ce sont là des raisons suffisantes pour monter. L’après-midi promet d’être radieuse, et ce soir on dégustera le gâteau. Il en a (...)
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26 octobre 2012, par Raymond Penblanc
Quand le fourgon mortuaire, quittant la nationale, a brusquement bifurqué sur la droite, ils l’ont immédiatement suivi, pour ne pas le perdre, pour ne pas le laisser filer seul en rase campagne. Par acquit de conscience, le cadet a quand même tenu à vérifier dans le rétroviseur si l’aîné réagissait comme eux. Refusant de tenir compte de cette modification non prévue, l’aîné et sa femme, (...)
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9 octobre 2012, par Raymond Penblanc
Elle marche autour de la table en s’appuyant des deux mains à la toile cirée. Un tour dans un sens, un tour dans l’autre. A la fin du deuxième tour elle est épuisée. D’ailleurs on l’entend souffler bruyamment. Elle reste quand même debout quelques minutes avant de se résoudre à se laisser tomber de toute sa hauteur sur sa chaise, une chaise spécialement conçue pour elle, plus large que la moyenne, munie (...)
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24 septembre 2012, par Raymond Penblanc
Décidément, les restaurants lui réussissaient bien. Non seulement on lui ôtait le souci d’avoir à composer les menus, non seulement il lui était permis de mettre les pieds sous la table et de n’en plus bouger pendant toute la durée du repas, non seulement, une fois celui-ci terminé, elle pouvait s’offrir le luxe de quitter la salle à manger sans avoir de comptes à rendre à personne (Marc y pourvoirait (...)
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27 septembre 2012, par Raymond Penblanc
Azra ne s’était pas contentée d’examiner la hauteur et la grosseur des troncs, leur écorce luisante et lisse. Elle avait vérifié également que les branches portaient un assez grand nombre de fleurs en boutons, dont elle avait testé la vigueur en tirant dessus. Puis, satisfaite de son choix, elle avait empoigné le pot en plastique noir qu’elle avait traîné derrière elle sur quelques mètres, jusqu’à (...)
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11 janvier 2013, par Raymond Penblanc
Il a toujours tenu à garder le stylo, un petit Bic bleu à pointe fine, désormais rangé dans le tiroir de son bureau. Pas un talisman, certes, loin de là, mais un témoignage, témoignage cruel qu’il lui arrive aujourd’hui encore d’interroger. Non pour essayer de comprendre. Il n’y a rien à comprendre. Un stylo n’est pas un objet énigmatique, un outil compliqué, ça n’est pas non plus un poignard, ou un (...)
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26 novembre 2012, par Raymond Penblanc
Mettez-nous du Bach, avais-je répondu à la fille, tout en me faisant la remarque qu’avec ce visage pâle très allongé aux tempes saillantes, avec ces cheveux mi-longs très raides, d’un noir d’encre (noir corbeau) qui lui tombaient sur les épaules, elle représentait une parfaite allégorie de la mort. Sa voix grave avait quelque chose de rauque et de lointain qui remuait des choses dans mes profondeurs, que (...)