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Guy Darol : Vingt ans qu’Agathe Ze Bouse est dans le pré. D’où vient cette
métaphore bovine ?
Agathe Ze Bouse : Elle vient du Charolais, pays natal de
Maurice « Vachelier », le chanteur. Il est né dans la bouse et a contaminé tout
le groupe. L’obsession bovine d’Agathe Ze Bouse a atteint son paroxysme dans
les années 2000-2001 avec la création de l’Opéra Bouse. Depuis, on tente de se
désintoxiquer avec quelques rechutes de temps à autre, notamment cette année
des 20 ans. Quant au nom, il est né au cours d’une nuit de remue-méninge en
septembre 1992.
Guy Darol : Quel est le band leader et où se trouve l’étable ?
Agathe Ze Bouse : La plus grande gueule, c’est encore Maurice... normal pour
un chanteur. Mais dans la vie du groupe, tout le monde apporte sa contribution,
dans les compositions, les textes, les arrangements, les idées scéniques, la
prospection, la promo, les productions... D’ailleurs les titres sont tous signés
Agathe Ze Bouse. Tout est mis dans la marmite commune, joyeusement touillé
et délicatement « bousillé ». Ca mijote parfois longtemps, mais on n’est pas
pressés ! L’étable se trouve dans un petit village au nord de Montpellier. Parfait
pour cultiver notre esprit vache et planter nos petites graines musicales.
Guy Darol : Broutez-vous de tout et de n’importe quoi ? À quelle herbe avez-
vous grandi ? Quelles sont vos racines ?
Agathe Ze Bouse : Bien sûr que l’on broute de tout, d’autant que chacun a
grandi dans des pâturages divers et variés : blues, funk, jazz, rock progressif...
On a brouté du Vian, du Led Zeppelin, du Talking Heads, du Prince, du Miles,
du Monk, du King Crismson, du Satie, du Bashung, du Katerine, du Magma, du
Zappa, pour ne citer qu’eux … mais on s’abreuve aussi de cinéma, de théâtre,
de peinture, de littérature, d’actualité musicale, sociale, politique, et même
de Zubrovska (pour l’herbe de bison). Bref, tout ce qui peut nous titiller les
neurones, les émotions et les zygomatiques. Avec 9 membres dans le groupe, on
pourrait remplir tout un catalogue d’inspirations éclectiques.
Guy Darol : Ce sont nos mœurs vient de tomber dans les bacs. Pourquoi se
justifier encore ?
Agathe Ze Bouse : Ce sont nos mœurs est un des nouveaux morceaux. On ne
pensait pas l’utiliser comme titre d’album, et il s’est finalement imposé. Non pas
comme une justification mais comme une affirmation : cet univers décalé, cette
galerie de personnages loufoques, ces collages musicaux, ces jeux avec les mots,
c’est bien nous. Et surtout, il allait « vachement » bien avec la pochette.
Guy Darol : Musicalement vous vibrez à quelles consonances ?
Agathe Ze Bouse : On vibre à toutes consonances en meuh bémol. Notre
dernier album nous semble être une bonne synthèse de ce qui nous fait vibrer :
on va de la chanson rock au free jazz en passant par le punk baroque et le
funk, entre autres... toutes sortes de consonances, saupoudrées de quelques
dissonances.
Guy Darol : Est-il vrai que vous regardez passer les trains ?
Agathe Ze Bouse : Bien sûr, on en a même fait une chanson il y a quelques
années.
Nous c’qui nous plaît c’est d’regarder
Toute la journée les trains passer
Nous c’qui nous plaît c’est d’transformer
Le vert de l’herbe en vert de lait
Extrait de l’Opéra bouse (2001).
En 20 ans on a aussi vu naître et mourir des groupes par wagons entiers... On les
regarde passer et on poursuit notre route.
Guy Darol : Est-il faux que vous êtes un groupe country ?
Agathe Ze Bouse : Vrai, c’est faux. On n’est pas plus un groupe country que
blues, ce que pourrait laisser penser notre dernière pochette ou notre nom.
Quoique, dans nos concerts, il n’est pas impossible d’en croiser quelques bribes,
au détour d’une chanson courte par exemple. En fait, on est un groupe de bouse.
Guy Darol : Est-il fondamentalement exact que votre dernier disque est la
somme de tous vos autres disques ?
Agathe Ze Bouse : Pas tout à fait. Pour faire cet album on a passé en revue
20 ans de compositions et sélectionné une douzaine de titres. On y retrouve
d’anciens morceaux réarrangés, d’autres jamais enregistrés, et de nouvelles
compos. Côté textes, il y en a des drôles, des sombres, des poétiques, des
surréalistes, des dérisoires, des portraits de personnages, des exercices de styles,
des jeux de mots subtils (ou pas)... Cet album est plutôt la somme de tout ce
qu’on a fait jusqu’à aujourd’hui.
Guy Darol : Aimez-vous le blues ? Ou êtes-vous radicalement bouse … pour ne
pas dire déviants ?
Agathe Ze Bouse : Il y a forcément un peu de blues dans nos racines, plus ou
moins selon les membres du groupe. Par contre, le coté radicalement bouse et
carrément déviant (ou de Volvic) est notre grand point commun. C’est l’esprit
même du groupe. Il y a chez nous un peu d’anarchisme, un poil de surréalisme,
un côté « border line », alternatif, déviant... On emprunte plus volontiers les
contre-allées que les autoroutes.
Guy Darol : Faut-il du courage pour être Meuh ?
Agathe Ze Bouse : Non, il suffit d’être membre de l’association, pour être
Meuh. Et pour être membre de l’association, il suffit d’être en Mouvement,
Emancipé, Universel et Hétéroclite. Outre un acronyme capilotracté, M.E.U.H
est aussi l’association qui gère Agathe Ze Bouse. A la fois société de production,
label, distributeur, tourneur... Agathe Ze Bouse, c’est de l’autoproduction totale
et certainement pas une vache à lait (la plupart des membres sont musicalement
amateurs, dans tous les sens du terme). Du courage pour être Meuh ? Non, juste
l’envie de se faire plaisir autour de projets musicaux, entre potes, avec une totale
liberté.
Guy Darol : Comment fait-on pour vous voir tourner dans l’enclos du rock pas
ordinaire.
Agathe Ze Bouse : On consulte nos dates de concert sur le site
agathezebouse.com ou la page facebook.com/page.agathezebouse, on fait le
plein d’ordinaire, on prend sa mob’lette, et l’on se rend à l’enclos indiqué. Les
prochaines dates fixées sont à :
Montpellier (Secret Place) le 12 janvier prochain,
Toulouse (Les Marins d’eau douce) le 22 mars et St Martin-de-Londres (festival
à l’Ombre du pic) le 20 juillet. D’autres vont bientôt tomber.
CONFESSIONS VACHES
par Guy Darol