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L’oeil de lynx de Mona Chollet - à propos du film « 17 Filles » 

Du féminisme, de sa défense dans le monde méta-politique, de l’entropie et de l’effet-retard des phénomènes prédictibles.

mardi 10 janvier 2012, par Aliette G. Certhoux

 « Lyncée était pilote du navire Argo lors de l’expédition des Argonautes. Ses yeux traversaient les murailles et pénétraient les nuages noirs du ciel (de là vient, par paronymie, l’expression d’« œil de lynx ») » — Wikipédia, Idas et Lyncée.
 Où la pensée est clairvoyante l’opinion égare et les aléas opèrent.
 Cet article n’est pas une analyse du film en référence, que je n’ai pas vu, mais une réflexion personnelle à propos de ma lecture de l’essai féministe que constitue la critique de ce film par Mona Chollet. Toute méta-interprétation du récit filmique que je pourrais donner n’a de sens que par rapport à la lecture du texte de Mona Chollet qui convoque le débat ; par conséquent, en dépit des apparences ce qui suit ne pourrait être considéré comme une recension critique de l’œuvre des sœurs Coulin. Mais il est possible de se dire en conclusion que si le cinéma n’est plus ce qu’il était cela tienne davantage aux impératifs sociaux du marché du divertissement, de l’évasion à l’identité, plutôt qu’à son évolution technique au passage du numérique. Pour évaluer le film on ne saurait conseiller que lire l’interprétation contextualisée de Mona Chollet sans oublier d’aller le découvrir directement à l’écran, si l’on peut. Non seulement l’évocation de 17 Filles par Mona Chollet nous rend curieux, mais encore il n’y a d’autre manière que d’éprouver directement la pertinence ou l’impertinence des commentaires qu’il suscite là (Périphéries) ou ici (La RdR) et au-delà (partout ailleurs).


Betty Friedan en tête du cortège pour l’égalité des femmes
à l’extérieur du Congrès
le 26 août 1971 à Washington


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 {} {} {} 17 filles et quelques objections, est une critique particulièrement intéressante de Mona Chollet sur l’actualisation du féminisme à propos du film éponyme de Delphine et Muriel Coulin sorti en France le 14 décembre 2011. Un premier film soutenu par arte France et canal +. Le fait divers qui a inspiré le scénario est qu’en 2008, l’année de la révélation publique de la première crise financière, dix huit adolescentes, lycéennes de la High School de Gloucester (Massachusetts, The USA) furent enceintes en même temps, d’un même homme (un homme « sans condition »), se promettant d’accoucher et de vivre entre elles, pour élever leurs enfants et finir leurs études ensemble. [1]

Ce qui renforce l’intérêt actuel de la critique de Mona Chollet c’est qu’on ressente ô combien le climat stressant de la crise peut contradictoirement de l’économie de la crise susciter chez les jeunes adultes un désir de survie pouvant se traduire par la hausse de la natalité, conséquence bien connue d’un réflexe grégaire contre le désespoir social d’un côté où de l’autre certains balancent du côté du suicide. Ensuite, elle fait une recension raisonnée des concepts féministes engagés aux États-Unis par une activiste historique des années 1960 à propos du mariage et de l’égalité des droits, qui à ses yeux tient lieu de fond de référence critique de l’événement américain récent, dans une voie qui découvre un combat plus que jamais ouvrable aujourd’hui, ici-même. Car à la fin du siècle dernier certains purent croire à tort la question de la domination dans le couple et son édifice institutionnel prochainement résolus — sauf aux élus masculins de lâcher sur la parité, ce que bien sûr ils n’ont jamais accepté de réaliser au sens strict. La question n’est pas le combat des femmes contre les hommes mais celle de l’existence responsable et non sacrificielle des femmes face aux impératifs masculins au-delà des classes (quoique Simone de Beauvoir pour désaliéner les femmes de leur assignation à la nature les ait dotées des attributs de classe exploitée afin d’armer une lutte politique progressiste pour leur égalité), en tant que groupe social méritant son droit à l’instar d’un autre.

Elle évoque l’idéologie de la femme enceinte, de la mère et de l’enfant, et dans son féminisme implacable elle défriche l’iconographie et les choix filmiques comme une terre fertile en clichés constructifs de la séduction du récit (des madones aux femmes au foyer), montrant comment l’histoire vue à la française (c’est la troisième adaptation de ce fait divers mais la première en France), née du souffle anticonformiste survenu par l’événement des adolescentes de Gloucester qui fut publié dans les journaux en juin 2008 mais récupéré par les familles et l’establishment en moins d’un an, reste au niveau le plus bas de la critique sociale permise par le cinéma de fiction : à partir du moment où les réalisatrices (ou leur production soucieuse de ne pas déplaire au profil moyen attendu par les distributeurs) ont choisi de conclure par une voix off, collant à la déclaration conforme de celle des parturientes qui en 2009 referma le dossier de Presse sur l’affaire, déclarant qu’il n’y avait pas eu de pacte. En sorte que dans le repli sur l’information documentaire pour clôturer la fiction plantée à Lorient, sur une connotation du « retour de l’enfant prodigue », l’effet d’une apologie du conformisme dominant ne fut-il pas recherché s’effectue de fait, en dépit du vent de subversion qui put planer — du coup par un spectaculaire malentendu — à l’image.

Sur la reproduction biologique et ses conséquences collectives, avec l’aura du sacrifice qui embellit la perte résultant dans la pratique sociale des femmes, les féministes, furent-elles des mères, combattirent toujours sur le front civil de l’organisation sociale refusant d’en être les dupes, à juste titre des libertés et de l’égalité civiques contre l’idéologie bourgeoise. À plus forte raison, si les féministes appartenaient à la bourgeoisie, elle payaient le prix psychologique de leur engagement, manipulées pour culpabiliser sur la virtualité de l’abandon des enfants [2], et dans les sociétés traditionnellement hétéro-sexuées advenant en modernité, certaines purent souffrir des épreuves de leur activisme jusqu’à être psychiquement menacées, autant que d’autres purent être aliénées par le système de la famille juqu’à en « devenir folles » (ce que note Mona Chollet à propos de l’impact de l’ouvrage de Betty Friedan en son temps, sans relever le harcèlement subi par les femmes au combat). Bref, le plus souvent les femmes dans la société doivent encore payer un prix personnel plus lourd que les hommes où qu’elles soient situées ou désirent se situer. Le couple hétéro-sexué, géniteur traditionnel biologique de la procréation, et ce naturalisme dans l’adoption et dans l’éducation, en passant par le système de la marchandise et la consommation, circule aussi dans le modèle parental du couple homosexuel suivant une abstraction des principes freudiens. Reste la question éducative du trans-genre mais là n’est pas le sujet ; reste enfin qu’en d’autres temps si des adolescentes purent demander l’accès à la contraception pour pouvoir s’adonner librement au plaisir sexuel avec des garçons sans risque de faire des enfants, celles de Gloucester de nos jours revendiquèrent leur capacité délibérée de se reproduire ; en faisant leur lot à distance du père et de la famille, elles développèrent l’idée d’une micro-société non assistée de mères-célibataires auto-organisées, s’entraidant matériellement et partageant leur économie — du moins était-ce leur projet avant le terme de leur gestation, — et là est le sujet.

La réversibilité inattendue du mot d’ordre féministe des adolescentes enceintes installe une déviance des modèles sociaux qui bouleverse les cartes réactionnaires contre l’avortement, autant que celles du progrès de l’interruption de la grossesse, parce que ce passage à l’acte de filles mineures de procréer pour manifester leur autonomie physique se revendique d’abord contre la famille et contre l’assistance sociale. La singularité de cette configuration qui trompe non seulement la règle des sociétés à l’ouest (dans tous les sens du terme) et sa critique, mais encore l’état des oppositions qui s’y affrontent entre religions et laïcité sur le sujet, nous renvoie à la pensée de la réversibilité chez Jean Baudrillard. On se dit qu’on a manqué des pages juteuses dans Libération ou dans Le Monde. S’il était encore vivant... Hélas, il nous a laissés en plan. Et pour plagier autrement un ministre négligent à l’enterrement de ce dernier : il nous reste à le relire (quand ce n’est à le lire).

Mais Mona Chollet qui ne faisait probablement pas sa tasse de thé de Baudrillard, pas particulièrement apprécié par les féministes à cause de la sexualisation de son discours, est heureusement là pour nous, en ses propres termes du passe-muraille, et je le dis sans ironie. Parce que si la transparence avec laquelle elle explore au scalpel le sujet à nos yeux reste convaincant par rapport aux fondamentaux politiques de la gauche, elle révèle aussi la perte possible du jugement cadré par la le système d’une autre époque. Si son analyse omet que nous soyons passés du monde politique, où la méthodologie matérialiste dialectique, marxiste, menait nécessairement aux réformes installant le progrès social, dans les sociétés de classe dont c’était l’appareil de raisonnement pragmatique correspondant, c’est que l’appareil d’analyse lui-même ne prend pas en compte ce qui a changé aujourd’hui, il demande à être adapté, ce n’est qu’une machine à interpréter. Et cela concerne aussi bien le changement stratégique des conditions du combat féministe, de révolutionnaire à réformiste, (le combat féministe devrait-il être mené sans relâche dans ses deux conditions collectives).

L’alignement de toutes choses selon le modèle de l’équivalence générale de l’argent suggère un autre système discriminant, en être ou ne pas en être, un système binaire qui laisse les actions et leurs effets monter à leur propre virtualité spéculative, à leur propre transgression de toute limite. S’il y a des inégalités : elles s’accroissent. Ce qui ne s’intègre pas d’un oui, est rejeté d’un non. En politique seul ce qui exécute existe, il n’y a pas de code éthique qui supposerait une observation différée pour les prises de décision, dans le cas où le risque spontané de le dépasser serait retenu, parce qu’il n’est plus nécessaire à atteindre l’objectif de la performance. Il n’y a pas d’action commune qui ne soit complice dans son déroulement sans délai plutôt qu’apparaissant sous l’aspect du projet. Si l’éthique réapparaît c’est que la morale règne en bien et en mal au cas par cas, déconnecté du code de la valeur qui réglait les nuances des anciens échanges entre classes et institutions pour tous (dans les démocraties réalisées). Désormais rien ne permet d’assurer que la morale, concernerait-elle une minorité opprimée, demeure liée à la nécessité du progrès social ou à l’égalité (ou alors en cadrant une montée aux extrêmes pouvant aussi mener des enfants à la majorité légale qu’à expulser un groupe humain pour une destination improbable), ni à son corrélat institutionnel dans le monde post-politique. Les appareils législatifs, exécutifs, judiciaires n’assurent rien de fixe, eux aussi suivent la dérèglementation. Et les résultats électoraux et la dégradation locale des démocraties tendraient même à plaider pour leur contraire. L’appareil d’analyse dialectique restant le repère n’est plus central mais périphérique, et cela comprend qu’il ne puisse plus à lui seul armer pertinemment l’engagement pour tous depuis la communauté, le parti, la classe, ou le pays géopolitique, qui l’énonce. Où le code critique du monde international était homogène par rapport aux droits humains universels, sans abolir les différences, il doit devenir hétérogène, ou se retrouver dans la binarité soit transgressive soit exclusive, et d’autant plus imprévisible qu’il est déconnecté du système supra-national qui met les démocraties en orbite. Sortir de la logique du bien et du mal est révolutionnaire en soi aujourd’hui, quand le raisonnement réformiste appliqué à la cause générale laisse pour compte les acteurs révolutionnaires explosés dans l’identitaire. C’est aussi cela la question féministe et son insertion activiste aujourd’hui ; si elle provoque des règlements ce n’est pas le signe pertinent que nous soyons en révolution ou en dictature. Cela comme d’autres choses loin de modifier peut instruire la régression d’une société qui après avoir sombré dans le sécuritaire s’engloutisse dans le pénitentiaire.

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 {} {} {} Dans son article, Mona Chollet relève le défi de s’intéresser à une œuvre sur un sujet qui lui tient à cœur, mais elle montre comment un film peut transformer la critique qu’il annonce en son contraire... Que 17 Filles s’affiche mieux en quête d’effets spectaculaires sociaux et plastiques, (aux références nombreuses dans l’anthropologie de l’art), ne serait pas pour lui déplaire — ni à nous,— si dans la part fictionnelle l’utopie sur laquelle surfent les réalisatrices (sans prendre le risque d’y plonger) y était assumée en conclusion. Loin de « cracher dans la soupe » d’un féminisme peu raisonné, elle encouragerait plutôt à aller voir cette œuvre qu’elle considère bien réalisée, justement pour nous édifier de la différence entre l’embellissement du cas social, ce qui constitue la société du divertissement en elle-même, et l’événement d’une utopie amicale, alternative de la famille pour les parturientes immatures. L’autonomie des comportements critiques se réalise quand l’art les pousse plus loin que la vie — parce que l’entourage des filles de Gloucester a trahi la promesse à l’acte d’une expérience collective, novatrice d’un désir social singulier, dans une société globalement dépressive.

Pour ce faire, pour nous donner à penser, Mona Chollet instruit le contexte de l’événement de Gloucester (puisque les réalisatrices y reviennent en conclusion), en regardant l’histoire féministe avant et après jusqu’à nos jours (comme les réalisatrices ne le font pas, mais on ne pourrait le leur reprocher, n’étant pas l’utopie mais la performance divertissante du cas social dans leur objectif, et la preuve arrive à la fin, quand le commentaire replie le film sur les situations ordinaires) ; évidemment, comme le cinéma emprunte substantiellement à la reproduction naturaliste technique de la vie, s’il économise l’utopie à propos d’un tel sujet il ne peut éviter la suggestion sociale aux dépens de la proposition critique, ni d’ailleurs, pour l’autre sexe, le voyeurisme. Dans son article, Mona Chollet considère la question de l’avortement et des ligues contre l’avortement, mais elle les renseigne historiquement par le féminisme moderne, depuis l’engagement des suffragettes en Angleterre (où naquit l’activisme féministe civique dans la seconde décennie du siècle dernier) et aux USA (où le lobby des mères de famille fut oppressif et politiquement actif pendant la guerre froide, notamment en termes d’influence de la censure et de la Presse, et dans la consommation, l’éducation, quand Ethel Rosenberg avait put être attaquée comme mauvaise mère pour justifier que personne ne la sauvât de la chaise électrique), jusqu’à l’ouvrage récent de l’historienne Stephanie Coontz A Strange Stirring. “The Feminine Mystique” and American Women at the Dawn of the 1960s paru en 2011 (pas encore traduit), qui revisite l’ouvrage culte de Betty Friedan cité dans le titre — et qui en 1960 « fut une bombe »... Je laisse la bibliographie de ces références à l’article cité qui les informe.

Et bien sûr loin de l’anecdote, a contrario le film en faisant sa matière, elle nous convoque au cœur même du sens collectif d’un combat qui n’a pas fini de demander d’agir, dans le camp du groupe social non dominant le plus partagé, les femmes, au moment où le rôle conformiste de la famille est rappelé à l’ordre, et le machisme qu’on avait pu croire en voie de disparition dans l’avancée des droits des femmes des années 1970 sévit, ayant fait un retour progressif puis globalement significatif et même violent, entre le déploiement de l’univers masculin dominant en ville comme à la maison — d’autant plus s’il apporte la part principale des ressources, mais pas d’autant moins s’il n’apporte que lui-même, pouvant toujours s’imposer de force sans rencontrer d’ombrage social particulier. Étant bien entendu que mon tableau ne comprend pas les cas particuliers du couple, et peut-être même certains cas de libre polygamie, toujours possibles au déni de la règle de la domination de l’homme, et heureusement plus nombreux qu’on ne l’imagine à ne pas craindre l’opprobre contre la différence. La femme marchandise, le commerce du sexe, les grandes muses, les femmes battues, les enfants violés, la plupart du temps par des hommes, en plus du défaut de parité légale exécutive, qui ne permet pas le plein accès à l’emploi ni à l’égalité des salaires, en France, quel que soit l’état de l’offre de l’emploi, tel est l’état des choses où nous nous trouvons à ce jour.

Le groupe féminin — et autres « minorités » civiques du droit (quand bien même elles seraient des majorités statistiques) — doit poursuivre de combattre plus que jamais dans un monde en pleine récession où le travail pour tous disparaît, les salaires diminuent par rapport à l’accroissement du coût de la vie, quand une version de l’esclave revient une fois encore sous l’économie collective de la femme ou « domestique » ou publique (et cela inclut tous les métiers du monde) [3]

Comme on l’a remarqué l’enjeu subversif du litige original des filles de Gloucester fut apparemment l’existence de leur pacte, (pour mémoire : être solidairement enceintes à peu près en même temps que la première d’entre elles, et de vivre en communauté féminine après leur accouchement pour élever leurs enfants et finir leurs études). Cela n’eut pas lieu (elles ne vécurent pas ensemble et apparemment l’une d’elles disparut tragiquement puisque sur les 18 déclarées il n’en reste que 17 — Mona Chollet l’évoque sans précision et nulle part je n’ai trouvé comment). Enfin, s’agissant de l’adaptation d’un fait divers et par conséquent d’une bio-fiction, si rien n’obligeait les réalisatrices à se conformer aux conclusions publiques du scandale américain, de surcroît il se pourrait qu’en privé les choses ne se soient pas passées aussi simplement que l’aléa déclaré un an après par la fameuse parturiente, quand elle crut bon d’affirmer qu’il n’y avait jamais eu de pacte (ce qui est peu crédible vu la synchronie de l’amitié des filles et de leur gestation en pleine scolarité). Et par conséquent la signification documentaire apposée à la fin ne peut même pas revendiquer le statut d’une vérité informée. C’est purement et simplement une convention. Le calcul n’est pas le bon, puisque le film n’a pas été primé. Tout au contraire, les sœurs Coulin auraient pu décrocher une palme si elles avaient osé défendre la fin qui gêne — du moins est-ce mon avis contre l’audimat virtuel du processus financier des films qui tue le cinéma de réalité-fiction parce qu’il l’empêche de décoller — de faire décoller la société.

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 {} {} {} Si le féminisme intelligent de Mona Chollet n’est plus à révéler, d’autant plus que son travail d’analyse dialectique avec le contexte historique nous convie à la rejoindre au meilleur niveau critique de la réflexion pragmatique, par contre je n’ai pas partagé sa façon contextualisée par l’actualité immédiate lorsqu’elle prit position dans l’affaire Polanski contre la Presse (même si), en rejoignant le chœur de l’opinion pénale qui s’éleva alors, le justifiant a priori et mieux en lui procurant des armes théoriques avec le brio habituel d’auteur engagé et informé qu’on lui connaît, car ceci ne changeait rien à l’inopportunité de prendre parti à ce moment contre la médiatisation populiste de l’affaire sur les réseaux sociaux — même s’ils s’élevaient contre la Presse captive.

Il eut fallu prendre position hors de ce marécage, le faire après, une fois la question de l’extradition résolue par la Suisse. Parce qu’avant, s’organisait une cabale diffuse pour influencer la décision politique dans le sens de la pénalité maximale, provoquant un aveuglement sur le travail idéologique élargi en train de se construire à l’œuvre des situations spéciales du moment. L’opprobre sexuelle dans les signes de ralliement projectifs allait devenir ultérieurement le terrain de manipulation des abus à cheval sur la xénophobie et les double nationalités. Non pas la libération de Polanski mais l’incarcération de DSK sera particulièrement, symboliquement, significative : non parce qu’il eut été piégé sur le vif, puisque qu’aucune charge n’était encore éprouvée, mais contradictoirement des apparences selon le juge qui cita d’ailleurs l’affaire Polanski, –– « on nous a déjà fait le coup avec Polanski », –– parce que la France “n’extradant pas” il aurait fallu empêcher DSK de revenir en France avant l’échéance du procès.

En réalité la suite a montré qu’il s’agissait en priorité d’immobiliser le président du FMI suffisamment longtemps, pour que son absence finissant par mettre en difficulté le rôle exécutif de son organisation, il finisse par se résoudre à démissionner. Ceci, devant mettre radicalement un terme à certains projets dans ce cadre international. Dans un second temps il s’agissait encore d’atteindre l’autonomie politique d’une campagne électorale nationale annoncée par la puissance de feu de la fortune personnelle de Anne Sainclair, en lui portant un coup fatal (non pas en l’appauvrissant mais en éradiquant le surplus). Seraient-ils finalement blanchis — respect ultime entre grands magouilleurs du monde oblige — par les intérêts qui les ciblèrent pour les empêcher, l’affaire a réussi : exit les Strauss-Kahn — mis hors du jeu exécutif. Le coup fut d’autant plus exemplaire de la puissance qui provoqua la chute de Strauss-Kahn qu’il faisait partie du groupe de Bildeberg. Sur orbite consultative. Que ce soit pour le meilleur ou pour le pire des choix collectifs à venir n’est pas la question. La question est celle de l’enchainement du jeu idéologico-médiatique et para-médiatique révélé à travers l’affaire Polanski, qui permit au pouvoir français d’être rallié par les média sociaux contre DSK sur le même fond d’opinion que l’affaire Polanski avait levé. Autrement dit, où l’ami culturel l’avait mis en échec avec la mise de l’opinion, de l’emporter avec la même mise contre l’adversaire électoral. Retournement des armes pariant sur la persistance de l’opinion conditionnée par quelques signes qui n’informent pas le contexte sinon cumulativement l’assignation, et cette accumulation thématique circulant avec le flux des événements.

Et par conséquent, si intelligent soit-on l’entropie de la communication en joue autrement, et cela prouve à quel point la contextualisation sociale de l’opinion émergente de la meilleure pensée peut compter contre elle-même après qu’elle se soit exprimée opportunément dans le flux médiatique, autant dans les réseaux sociaux libres que dans la Presse captive, du moins être rattrapée et sinon directement récupérée être submergée par l’opportunisme du monde auquel elle s’oppose. En quoi la pensée donnant matière à réflexion ne peut à son grand dam coller à l’événement qu’elle informe, sauf figures de rhétorique et par conséquent pas en termes d’impact réel du journalisme. L’émotion, le pathos, si affectivement et intellectuellement exprimés et sincères seraient-ils, sont les ennemis de la juste cause autant que la désinformation délibérée la plus vulgaire peut manipuler la crédibilité des sources.

Le mâle qui assigne l’exception de sa puissance professionnelle par sa capacité de produire sa sexualité excessive est un homme voué à sa perte, c’est bien dommage. Pour autant : d’abord on a vu comment la Presse monta en défense de Polanski — il avait commis un viol caractérisé, aucune contestation sur ce point, le litige étant sur la purge forclose ou prescrite de sa peine, et dans ce cas il ne s’agissait d’une question de justice mais d’une question judiciaire et pénitentiaire américaine ; ce qui put laisser croire à tort que le débat restait légitime quand l’opinion embraya sur la morale et le statut social. Ensuite on a vu la même Presse monter en attaque contre DSK — il avait commis quelque chose sans viol caractérisé ni criminalité prouvée, et par conséquent c’était le consumérisme sexuel extra-conjugal lui-même qu’on jugeait ; fut-il « lourd », dans ce cas il ne s’agissait d’abord que de morale. Ce qui voudrait montrer que rien ne se joue dans l’impact de l’information sans compter avec son auto-désinformation.

C’est donc vainement à mes yeux qu’en termes politiques du féminisme dans la défense des droits la clairvoyance de Mona Chollet put s’appliquer à un défrichage dialectique sur le menu détail de ces deux affaires dans le Monde diplomatique du 23 mai 2011 : Les informulés d’une rhétorique sexiste, même si là encore son système d’analyse énergique ne manque pas de pertinence pour autant il manque de clairvoyace. Et ici je m’expose à faire partie sexiste dans la globalisation logique de son raisonnement. Qu’est donc devenue dans le monde méta-politique la défense des femmes qui dans le monde politique put faire partie des revendications révolutionnaires des classes exploitées, sinon rejoindre le radicalisme populiste en réclamant du pénal au lieu de porter l’étendard du changement ? De l’autodéfense, aujourd’hui, certes il en faut sinon les femmes seraient écrasées dans la violence.

Mais c’est triste à dire, force est d’admettre qu’à trop vouloir agiter le fantôme du politique dans le monde méta-politique le féminisme rejoint indifféremment, inclus par la défense de la morale sociale à propos des femmes : Nadine Morano, Valérie Précresse, Michèle Alliot-Marie, Christine Lagarde, Marine Le Pen, Condoleezza Rice, Hilary Clinton (j’y reviendrai plus particulièrement car c’est en tant qu’activiste féministe qu’elle démarra sa carrière), Angela Merkel, Anne Lauvergeon, ou même la dernière muse au foyer dont la richesse personnelle permet de supporter les risques d’avoir voulu être dans la petite France ce que Marilyn ne parvint pas à être dans les grands États-Unis d’Amérique : Carla Bruni. Je ne situe pas là une critique des femmes de pouvoir mais la ligne matérialiste féministe qui peut considérer comme un territoire de conquête la filière oligarchique des écoles techniques supérieures, et la hiérarchie corrompue des groupes parlementaires et gouvernementaux. Et notamment : comment ceux-ci peuvent inclure des femmes exemplaires au plus haut niveau de la hiérarchie sociale exécutive. Ainsi, les Rachida Dati et les Fadela Amara, à des stades différents de la réussite de leur ascension, peuvent être cooptées en tant que brillante étrangère ou organisatrice du pauvre, par l’élite « alterophobe » soucieuse de marquer ses frontières pour faire croire à leur fluidité, distribuant des bons points aux damnés nationaux de son choix, avec passeport pour la nomenclature en prime de la surélévation du niveau de vie. Mais selon la vieille problématique du maître et de l’esclave, elles peuvent ultérieurement essuyer les plâtres du machisme de proximité et du machisme de parti, sans soulever de révolte dans les rangs de mes sœurs. Parce qu’elles l’auraient bien cherché ? Mais alors pourquoi des femmes ne pourraient-elles pas aussi bien avoir cherché le sexe à risque ? Pour dire que ce genre d’argument convenu pourri à propos de la sexualité abusée des femmes l’est autant à propos des femmes au pouvoir abusé, celles que justement on ne défend pas dans les rangs du féminisme, parce que le féminisme même chez les bourgeois reste attaché à la défense des classes exploitées de l’ancien cadre des luttes sociales, comme à ses débuts. L’auraient-elles ou pas « cherché », une seule question quand on pavoise avec le blason du pénal : le crime est-il reconnu par la loi ? Et la flexibilité de sa définition légale, instruite par la jurisprudence, ou l’accumulation des décrets visant un contour exhaustif de la criminalité (la loi totale dans la somme de ses fragments — je dis bien total comme totalitaire), dans ce cas n’est pas rassurante sur les institutions. Même des femmes inquiètes ne pourraient être rassurées par la prévoyance répressive de n’importe quel cas criminel possible à leur encontre, qui ainsi pourrait leur faire croire à tort qu’elles soient universellement protégées à défaut d’être universellement intégrées ; elles savent parfaitement qu’à tout moment une tuile « aléatoire » peut leur tomber sur la tête au coin d’une rue.

Voici dans le site rezo.net le frontispice du 2 janvier dédié à l’article fouillé que personnellement je conseille vivement d’aller lire... d’autant plus qu’il ne vous sera pas demandé un quota d’euros pour y accéder : c’est non seulement intelligent et informé mais de plus gratuit, comme dans La RdR et quelques autres encore :

« Subversive, la mater­nité ? Si “17 filles” peut déf­endre cette thèse, c’est que, en tant que film français de bon goût, il évacue réso­lument toute la culture popu­laire dont notre monde est baigné ; c’est-à-dire la culture où appa­raît de façon fla­grante la sur­va­lo­ri­sa­tion de la mater­nité, pour ne pas dire sa valo­ri­sa­tion exclu­sive, qui reste aujourd’hui domi­nante dans de larges pans de la société. »

Oui et non : sous la réserve que Marine le Pen contrairement à son père puisse défendre la contraception, le conformisme nationaliste hérité du pouvoir collaborationniste de Pétain dans ce cas paraît s’être déplacé d’un bon à distance de l’intégrisme religieux. C’est dangereux quand le féminisme s’intègre. Oui et non : sous la réserve que le foulard ne soit pas nécessairement une preuve d’intégrisme religieux ; précisément le foulard de Ilham Moussaid membre du NPA défendait la contraception et n’aurait donc pu, sinon par malentendu ou par manipulation, la faire considérer comme une musulmane intégriste, les musulmans intégristes étant créationnistes (et donc contre l’avortement autant que les intégristes chrétiens). Et là je veux dire au conformisme marxiste et au conformisme laïque comme au conformisme religieux que l’habit ne fait pas l’acte du moine, même si le moine habille parfois l’activiste et le citoyen, et parfois le citoyen délinquant, au temps de la diversité culturelle et internationale des pays qui ne détiennent plus les clés de la connaissance universelle qui administra la culture des colonies. La question est juste d’avoir un bon code du vivre ensemble et qu’il soit respecté.

Voyons les décolletés des femmes et les vêtements qui montrent leurs cuisses sans que pour autant elles soient des putes. Quant au ministre de la culture Mitterrand dont Mona Chollet en dépit de ses idées attendit si longtemps, comme tout le monde, pour exprimer une critique de ses mœurs seulement au moment de l’affaire Polanski, reste à me surprendre. L’homme est devenu peu sympathique mais personne ne peut lui dénier son passé actif dans la culture, et même dans un temps antérieur qui lui coûta cher comme entrepreneur solidaire dans la contre-culture, ni qu’il ait produit quelques œuvres d’auteur, films et livres généralement auto-biographiques ou auto-fictionnels qui l’avaient rendu transparent depuis longtemps, et notamment à travers son ouvrage La mauvaise vie paru en 2005. Livre soudain cité pour évaluer la piètre qualité du protagoniste de la défense du cinéaste délictueux, que la nouvelle condition de ministre de la culture de son auteur rendit accablant, alors que l’ouvrage au moment de sa parution (chez Robert Laffont) avait plutôt été considéré à l’époque comme un ouvrage courageux, dans la mesure où il n’exprimait pas une habitude mais un regret, au moment de la grande mode du repentir en clair obscur italien. Je suis d’une génération qui a connu des prisonniers écrivains, je ne parle même pas des auteurs de polar mais me demande simplement si aujourd’hui un Genet d’abord inspiré par sa vie de voyou pourrait écrire en prison pour être publié, n’existant plus de Sartre possible pour l’aider. Et pour ne pas parler de Violette Leduc et de Simone de Beauvoir qui l’imposa, d’Albertine Sarrazin qui mourrut mal soignée d’être négligemment traitée comme une prostituée arabe en France, ou même de Christiane Rochefort — avec un livre comme Le repos du guerrier, auto-fictionnel et idéologiquement confus concernant les femmes. Que dire de la littérature Manga et de la grande criminalité de certains de ses auteurs ?

Tout cela demeure pour moi un grand point d’interrogation sur l’infaillibilité des certitudes de la pensée socialement engagée selon laquelle le raisonnement serait désaliéné de l’opinion, a fortiori étant mis en évidence que les idées du temps et les lois changent la donne des critères. [4]

Ce n’est donc pas sur ma sensibilité de Polanski ou de sa biographie que je viens de m’exprimer, car mon opinion ne vaut pas mieux que celle des autres, mais pour montrer la façon dont les affaires s’ouvrent dans les affaires comme des poupées russes, grâce à la thématique sexuelle, appel privilégié des fantasmes et du désir sous la forme de signes attractifs, servant des messages médiatiques dont le contenu directionnel n’a rien à voir avec l’aspect de leur langage alignant des actes sans relation ni qualité. Et je me dis qu’il est utile de savoir comment l’engagement critique fondé sur l’opinion, au titre du rôle légitime de l’intuition dans la réflexion, serait peut être abusé par le feed-back des événements produits ultérieurement, quand ils se révèlent récurrents et prédictibles a posteriori des nouveaux phénomènes touchant des situations et des personnalités différentes, souvent imprévisibles.

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 {} {} {} Certes, l’article Polanski, Mitterrand : le soliloque du dominant du 10 octobre 2009 était intéressant notamment sa revue de Presse particulièrement édifiante, du moins paradoxalement juste hors contexte ; seulement parmi le déferlement nauséabond des fantasmes soutenant la demande d’extradition pour livrer Polanski à la justice américaine, (et pour aller au-delà non pas en évaluant la justice américaine mais en rappelant certains de ses aspects en contre-exemple de la justice pour les femmes : une justice lobbyiste aux juges élus où la liberté peut s’acheter légalement en monnaie sonnante et trébuchante tant qu’il n’y a pas de condamnation à mort ni de particularisme moral en jeu. Sur fond de lynchage médiatique et de réclamation de la peine maximale dans les réseaux sociaux, on ne peut pas dire qu’il fut opportun d’en rajouter une couche si pertinente fut-elle face à la stigmatisation de la Presse, quand rien d’autre ne pouvait être entendu que nourrir l’oreille publique frustrée de tout — y compris du résultat des consultations électorales car enfin, qui aurait-pu avaler sans humiliation durable la pilule du traité de Lisbonne après le résultat du référendum ?

Et par conséquent, en ne pouvant procéder autrement que par le biais collatéral, cautionner une réactualisation de l’extrême droite à l’acte de forger l’idéologie dominante, y compris parmi la gauche car c’est le principe de la morale lui-même qui brise les frontières de la pertinence critique, dans un monde où le déni de reconnaître que le politique ne fait plus sens instruit les dérives du droit au nom de la morale ou de sa transgression, comme des comportements sociaux ou asociaux.

De Polanski aux Roms voyant passer au loin Stavisky, la confusion ne balançait-elle pas clairement d’un seul côté ? Non pas celui de la justice ni du droit, mais des commentaires populaires égarés dans un monde aux symboles perdus réclamant le pouce en bas la peine contre les agissements des fous, quelles que furent les intérêts ploutocrates qui se mirent à vouloir aider le cinéaste. Cette entrée publique des réseaux sociaux français en ingérence symbiotique dans l’univers de la communication numérique américaine ont préparé la curée médiatique de DSK, toujours une affaire sexuelle ou une indécente richesse pour mobiliser le refoulement de l’opinion. Dans ce cas l’opinion a justifié le précédent judiciaire inadmissible créé par le partage des dossiers entre deux pays qui ne sont pas sous la même juridiction judiciaire ni pénitentiaire, concernant une accusation sans preuve pour un crime sans mort et sans menace pour la sécurité nationale. Le partage des dossiers entre avocats français et américain, les prétentions de Me Kenneth Thompson à vouloir requérir le tribunal de Nanterre pour recueillir une nouvelle déposition, et l’invitation à comparaître de Me Koubbi par le juge New Yorkais de l’affaire Nafissatou Diallo, me posent des problèmes qui néanmoins ne lèsent pas les victimes.

L’enjeu féministe — à évaluer par le crime commis — était-il tel que tout cela parût normal ? Quels sont les journaux français parmi ceux qui s’étaient levés pour défendre Polanski qui au contraire n’auraient pas cautionné la Presse américaine sur le cas DSK, par intérêt corporatiste au début et autres intérêts de parti ensuite, sans même relever le détail certes trop gros pour être endossé, des aspects anti-constitutionnels d’un précédent juridique contre l’intégrité démocratique de la république locale (la république ne resterait pas une et indivisible face au système judiciaire d’un autre pays, y compris dans les cas les plus ordinaires). Dans l’affaire DSK, une surprenante mondialisation des échanges à l’égide du pays dominant s’est révélée comme un développement des implications institutionnelles de l’affaire Polanski, bateleur criminel dans un temps révolu, sans récidive, dont le moins qu’on puisse dire si un jour il s’était évadé au moment de retourner en prison comme il venait juste d’en sortir pour le même délit, est que, pour comparer avec la situation de son pair, le FMI n’attendait pas sa démission pour recommencer à fonctionner sans changement... Sinon le ministre de la culture, tout Mitterrand à la mauvais vie fut-il, l’aurait laissé tomber. Aller chercher la mauvaise vie de Mitterrand était certainement efficace pour édifier les positions contre Polanski recadré par ses défenseurs peu sympathiques, mais pas pertinent sur le cas Polanski de ce côté de l’Atlantique, où la seule discussion cohérente avec la situation européenne aurait du être sur le principe de l’extradition et non sur le jugement (fait ailleurs), si privilégiés et/ou compromis furent-ils séparément ou ensemble. C’était un peu à l’égal de la condition suffisante de frère entre des agneaux pour que ce ne put être nécessairement qu’un agneau qui pût troubler l’eau où le loup venait se désaltérer.

Mais au-delà reste la question éthique de la globalisation : quand bien même une loi contre le harcèlement sexuel fut promulguée aux USA, ce pays serait-il imitable au point qu’il n’ait toujours pas légiféré contre le lynchage ni aboli la peine de mort au niveau fédéral ? Le FBI n’y gèrerait-il plus les écoutes, les arrestations et les interrogatoires, du Patriot Act ? Le Président aurait-il obtenu la fermeture de Guantanamo — et aurait-il inauguré le Minimum social ? Je voudrais qu’on m’explique comment on peut être aussi radical en matière de demande de justice, attendue de l’octroi du pouvoir conformiste en place, sans rendre celui-ci légitime, en périphérie, d’être contesté. Serait-ce à propos de la femme à défendre à juste titre, en s’obstinant à ignorer le contexte qui appelle à défendre, et la claire façon de la présenter vivante en visage et en pied pleurant en scène : masquer le trouble planté en coulisses — serait-ce pour mieux la défendre en forçant le résultat ? Est-ce cela un système judiciaire bien conçu, pour une justice bien administrée, et bien rendue, selon la probabilité de la meilleure justice dans tous les cas pour tous ?

Ainsi on a pu observer concernant DSK la réalité d’une collaboration qui n’était restée qu’à l’état de vœux pieux dans les commentaires critiques sur Polanski, et il nous fut donné de constater le déploiement d’un champ de bataille méta-politique unitaire de l’extrême gauche à l’extrême droite (je ne parle pas de programmes de partis mais des prétentions et du signe révolutionnaires et réactionnaires en effusion), contre un seul individu à chaque fois, pour l’admettre. Quelle sera la prochaine étape sur des questions n’impliquant pas le sexe ? Car la transgression étant faite une fois, ce qui est permis est admis, y compris dans le domaine du dépassement de la loi par ceux qui la représentent et ceux qui la communiquent. Les commentaires dans les forums des journaux ou des réseaux sociaux se présentent comme un phénomène semblable au plébiscite électoral ; mais au moins l’électeur qui participe à un plébiscite sait qu’il peut s’attendre à un abus de la part du plébiscité, tandis que le consensus des commentaires, autant alimentés par les adversaires que par les partisans et même se présentant comme l’autre, dans les mêmes colonnes, ne fait pas émerger à la conscience les conséquences de ses bavardages publics nonobstant qu’ils aient lieu dans l’environnement d’un pouvoir installé par la désinformation.

S’il est bien clair aujourd’hui que le problème de justice de Tristane Banon surenchérissant le cas de Nafissatou Diallo permit d’outrepasser les limites judiciaires en délocalisant l’affaire au nom d’une nébuleuse internationale féministe, ce qui devient non moins clair est qu’en plus de se mêler de justifier la procédure américaine, où certains avaient pu penser cibler à juste titre le clan Sarkozy à propos de sa protection de Polanski, ils furent pris de vitesse par la procédure de l’affaire DSK, et ils ne firent qu’armer le pouvoir français d’un climat idéologique opportun pour expérimenter la possibilité d’un règlement médiatique radical du cas DSK en France, plutôt que judiciaire, et le laboratoire de la manipulation entrant dans le flux a fait une expérience réussie. Succès total. Grande Première régionale européenne. L’affaire de Lille restera sans suite parce qu’inaugurée par la découverte d’un SMS qui n’a révélé que des limites privées franchies, pas de crime, poserait plutôt que le problème de son contenu celui du téléphone à la source (le téléphone volé à New York ?)... L’enjeu de toutes façons est déjà résolu ici, c’était juste pour dissuader le parti socialiste de le faire revenir... À voir DSK radicalement écarté du pouvoir et sûrement plus durablement que Michèle Alliot-Marie, on se dit que pour le président actuel et son entourage militant, avant de se lancer dans la campagne électorale, l’ellipse du principal concurrent fut parfaite. Quant au dernier recours civil après le rejet judiciaire de la plainte de Tristane Banon, on voit mal comment cette nouvelle procédure pourrait aller à son terme en se clôturant par une condamnation qui ne serait pas juridiquement abusive. Sa mère a compté. Et bien je n’ai pas eu envie de les rejoindre. Même si l’on ne met pas en doute les violences que sa fille déclare avoir subi d’avoir du résister, le code judiciaire aux limites du dépassement de sa jurisprudence doit s’en tenir à une règle statistique justifiant au nom de tous qu’il ne soit pas transgressé, sinon ce n’est plus un cadre judiciaire mais arbitraire. Et qu’il ne puisse s’adapter à l’opinion ne devrait pas nous inquiéter tant qu’il ne s’adapte pas à la domination de l’exécutif qui refuse de s’en séparer.

Pourtant, tout cela a servi à quelque chose qui n’était pas dit mais qui se voit après coup, la somme du résultat est là, et pour l’essentiel nous la connaissons déjà. La monnaie de réserve, la dette, la « démocratie grecque », l’euro du lobby financier, l’Europe... etc. Et pourtant, que cet homme est antipathique de prendre de tels risques aux dépens des femmes.

Ravalons la morale cela permettra de changer d’éthique. J’ai connu un moment citoyen où chaque élection présidentielle ouvrait la porte des prisons vers la ville pour tous les petits délits et les peines parvenant à leur terme. Il ne s’agissait pas que des contraventions. Et si le général de Gaulle fut un apôtre de l’amnistie générale ses successeurs n’y dérogèrent pas jusqu’au second mandat de François Mitterrand qui inaugura la première dérive morale de ne pas la réaliser, suivie par celle de Chirac. On sait ce qu’il en est advenu du sécuritaire entre les mains de Sarkozy. Une des raisons de la surpopulation des prisons est qu’il n’y ait plus d’amnistie générale. Cela n’empêche pas la délinquance de s’accroître dans la population laissée pour compte d’elle-même. Quel candidat à la présidence pourrait inscrire dans son programme le retour à l’amnistie générale sans se faire éjecter au premier tour (à compter qu’il ait pu trouver les cinq cent signatures pour se présenter) ?! Aucun. Pourtant, chaque nuit davantage de femmes se font agresser dans la rue, le plus souvent pas pour être violées, mais pour se faire voler leur sac — pour dix « balles », — envoyées à l’hôpital ; et si ne pas porter plainte serait irresponsable, d’autres chez elles, de plus en plus nombreuses, attendent silencieusement le retour du bourreau, chaque soir. Quand on imagine tous ceux qui ne sont pas encore en prison, on se demande où ils pourraient y trouver leur place. On ne traite pas les problèmes de société en enfermant tous ceux qui les manifestent, même s’il faut bien empêcher de poursuivre ceux qui blessent, qui frappent, et qui tuent, délibérément, serait-ce par égarement personnel ou par désir.

« Sécurité ». Je me suis toujours dit que la traduction française du mot américain « security » par “sécurité” était un contresens. Ici on aurait mieux dit : « sûreté ». Parce que la sécurité n’est pas le pénitentiaire (du moins ne l’était pas) et ceux qu’on enferme on les met en « sûreté ». Sur le chemin du lobbyisme et du mélange des genres frémit l’onde d’une anguille sous roche, ce sont les accords-cadre secrets de la sécurité entre les USA et la France de monsieur Sarkozy, et principalement puisqu’il a réintégré la France en fanfares dans l’OTAN, et avec ses armes prenant la charge militaire de la répression en cas de désordre en Europe. Grâce à cela on a réintroduit une forme de condamnation à mort, plus arbitraire que la pénitentiaire, dans le droit de tuer pour le rétablissement de l’ordre, et c’est couché dans le Traité de Lisbonne. Il a fait dérober l’accès public des archives judiciaires recensées aux Invalides aux bons soins de monsieur Bauer — lors d’une de ses nombreuses missions de sécurité, — qui en a organisé la classification et l’accès. Invalides où, soit dit entre parenthèses, Hilary Clinton lors de son premier voyage en France s’est rendue, pour renouveler le pacte de sécurité réglé par Condoleezza Rice (qui la précéda au même poste). En sorte que si nos archives judiciaires ne sont pas transparentes pour la population démocratique, elles le sont pour le Département d’État des États-Unis.

Puisqu’on cite Hilary Clinton libérons-la des parenthèses pour rejoindre nos moutons. Elle a commencé comme avocate féministe particulièrement remarquée grâce à ses exploits de tribunal contre des bourreaux de femmes et d’enfants battus, et en 1977 elle a fondé l’organisation de défense des familles et des enfants de l’Arkansas, ce qui ne l’a pas empêchée d’être engagée, au niveau de son poste de secrétaire d’État aux affaires étrangères, dans l’impérialisme américain et ses guerres. À propos de sa certitude, peut-être la doit-elle à l’éducation qu’elle reçut au moment de la révolution privée des femmes sous l’effet du livre de Betty Friedan en 1963, The Feminine Mystique [5], informé par Mona Chollet [6].

Avec la misogynie dominante dans les modèles bourgeois et petit-bourgeois le combat féministe s’était caractérisé à gauche, il est aujourd’hui diffus, indifféremment présent, partout, et c’est pourquoi lui attribuer des vertus politiques expose à invoquer aussi bien les flics qu’à cautionner les ploutocrates, resterait-on ancré dans la parole au nom du progrès des dominés ou du renversement des dominants. Non pas les femelles ploutocrates ou oligarques — ce serait trop gros, il ne pourrait y avoir de leurre, si elles deviennent victimes elles restent en pâture dans leur camp, — mais la communication interactive diffuse d’un langage populaire qui envoie des signes depuis lesquels n’importe quel pouvoir peut organiser l’émotion contextuelle qui lui permette d’agir non pas pour le chœur mais contre lui. Chaque contribution la plus censée qui relève le niveau de ce marécage médiatique, informant son cadre d’engagement appelé par les événements, n’éclaire malheureusement pas seulement les animaux qui l’habitent mais encore la voie possible pour la barque du roi dans les roseaux en broussaille, où ils pensent être protégés par leur milieu. Quand la complexité dialectique se réduit à l’alternative binaire, certes, que de combats institutionnels restent à mener ! Mais que de choses devrions-nous encore apprendre par l’acte de contribuer à informer l’opinion ! En fait, pour en être moins le jeu, on devrait toujours mettre des bémols au lieu d’enfoncer le clou tribun. Le pouvoir machiste contre lequel nous nous battons n’est pas spécifiquement celui qui opprime systématiquement le plus de monde par ailleurs, celui que je refuse de ne pas combattre d’abord, quand le temps de la cohérence révolu fait place au déferlement de la masse critique — je veux parler non des gens mais de l’entropie qui les contient ou les submerge ou que leurs actes génèrent dans l’ordre des choses.

Dans un gouvernement le plus juste, anti-liberticide, pouvant arriver des conséquences de nos actes (électoraux — j’entends, dans le meilleur des cas), on sait qu’il resterait encore le pas de l’égalité des femmes à franchir. Mais pourtant, il n’y aurait plus — il n’y a pas — à attendre des suffrages les plus féministes le résultat le plus effectif du changement en faveur de tous, à partir du moment où les féministes placeraient — placent — leurs intérêts identitaires, ne seraient-ils pas communautaires, en avant de la cause commune (collective). Si aujourd’hui le combat féministe est toujours légitime, à devoir plus que jamais se battre contre la violence frappant les femmes, qui se développe d’autant plus que les sociétés inégales sont en crise et que les hommes perdent leur travail, et donc se battre en même temps pour la parité sans différer, le féminisme peut néanmoins servir aussi bien d’appât, ou de leurre, n’être qu’un signe interchangeable dans une vaste grammaire médiatique. C’est un trait de la post-modernité qui a abattu la chaîne symbolique. La pensée engagée n’a plus l’impact direct qu’elle a eu, mais indirect — peu importe qu’elle soit redevenue nécessaire. Et par conséquent, son effet amasse toutes sortes de débris sur son chemin, des débris qui comptent, non pas comme une pierre roulant vers sa cible pourrait s’en trouver dévoyée, mais comme une boule de neige qui roule s’accroît en pouvant s’accumuler avec divers objets qui affleurent sur la piste, brindilles, cailloux ou capsules de coca-cola, et devient hétérogène. On devrait apprendre de l’entropie et de l’ordre des événements prédictibles et plus encore des signes de la communication — serait-elle les média citoyens dans nos sociétés où les citoyens, si libres seraient-ils de s’exprimer, auraient cependant perdu en même temps que l’objet de la démocratie leur rôle historique. Prendre parti expose à servir la cause combattue. Plagier le leurre expose à être exclu. Ironiser expose à être poursuivi. Cependant pensons davantage, pensons d’autant plus qu’il soit question de contexte et de stratégies.

On a vu Bénédicte Desforges et Marine Le Pen sur deux rives différentes avancer avec les mêmes arguments sur la délinquance sexuelle masculine, globalisant la classe politique et les artistes comme dynamiteurs de l’ordre moral, et donc forcément comme des criminels potentiels, et les activistes féministes marxistes ou libertaires se ranger derrière elles dans un ralliement identitaire en ayant l’air de ne pas les voir, face à Polanski comme face à DSK. Comme si l’un et l’autre étaient des assassins aux meurtres consommés, deux visages de M. Le Maudit dans un jeu virtuel du tribunal populaire à la cave. Les mêmes réseaux sociaux ont manifesté une lutte contre le pouvoir dans un cas, et une collusion avec le pouvoir dans l’autre cas, mais dans les deux cas c’était la même diversité agitatrice réclamant unanimement la peine maximale : ce n’est pas un signe de bonne santé dans une société. Et le fond d’écran de l’énergie moutonnière est l’aléa qu’un pouvoir ayant extradé les italiens soit aussi bien capable soudain de les en soustraire, sans s’empêcher d’inaugurer la déportation des Roms. On appelle ça, pour employer un mot opérationnel dans le temps qui sévit, la dérèglementation — tout est passible de dérèglementation dans le monde actuel, du commerce à la justice. Il n’y a pas de parti politique qui ne soit exempt d’opportunisme électoral ou oligarchique ni de s’y retrouver dans un sens qu’il n’avait pas prévu dans son propre mouvement. Mais cela vaut aussi pour l’engagement de l’opinion. Une fois l’effet vu, 2011 s’achève sans avoir été compris et 2012 arrive de la même façon... Qu’est-ce qu’on va faire ?

Suivons Mona Chollet :

« Betty Friedan rend manifeste quelque chose dont devraient se souvenir ceux qui pestent contre les « excès du féminisme » : quand les femmes ne font pas de vagues, mais restent cantonnées dans des rôles étriqués ou débilitants, elles le payent toujours d’une manière ou d’une autre. Il y a des conséquences - et celles-ci valent largement le « malaise des hommes » censé survenir quand leurs compagnes ont l’outrecuidance de vouloir vivre comme des êtres humains. Ainsi, au début des années 1960, beaucoup de ces Américaines de la classe moyenne blanche étaient à moitié folles d’aliénation. Dans ce contexte, The Feminine Mystique fut une bombe. En leur disant qu’il était normal d’aspirer à quelque chose de plus qu’à une vie domestique heureuse, que ce n’était pas elles qui avaient un problème, mais la société, il transforma littéralement leur existence. »

Toutes choses de ma part étant dites : je suis d’accord avec Mona Chollet.

C’est « 17 filles » et pas mal d’objections @ peripheries.net.

A. G. C.


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P.-S.

Betty Friedan (en.wikipedia)

Notes

[1Voir le chapitre « Teen pregnancy controversy » dans l’article de wikipedia sur le lycée de Gloucester Gloucester High School (Massachusetts).

[2Sur la question de l’activité extérieure à la maternité d’une femme on connaît des exemples de femmes déculpabilisées en un temps où aucun autre choix que l’abandon consenti auprès d’une nourrice n’était possible, tel celui de l’activiste Flora Tristan (1803-1844), aristocrate franco-péruvienne, féministe et militante ouvrière à laquelle on prête le premier ralliement national syndicaliste et la base de la première internationale. Non seulement son engagement résista à la pression sociale et policière mais sortant d’une incarcération elle décida de confier l’éducation de sa fille à une mère adoptive, jugeant que les emprisonnements fréquents autant que les voyages auxquels son activisme l’exposait n’offraient pas des conditions convenant à la sécurité d’un enfant. Ainsi abandonna-t-elle sa fille sans ignorer son existence, qui donna naissance au non moins surprenant Paul Gauguin, dont l’éducation connotée par l’utopie dans un contexte familial libertaire à l’acte des vies éclaira sa quête artistique, radicale et solitaire, ses recherches, ses voyages.

[3Mère au foyer laquelle pourrait aussi bien être un homme au foyer, car dans le raisonnement de l’égalité universelle des droits on ne voit pas pourquoi la production naturelle de l’accouchement par des femmes départirait les pères de l’accès à l’éducation des enfants auxquels ils auraient contribué qu’ils existent, ni même à ceux qu’ils auraient contribué à adopter ou à élever.

[4Il s’agit de l’article du 10 octobre 2009 par Mona Chollet, également paru dans le site Périphéries, Polanski, Mitterrand : le soliloque du dominant, non moins remarquable une fois les faits dépassés, mais que certains ont considéré médiatiquement inopportun à l’époque où il fut publié en pleine mobilisation confuse de l’opinion, où la ploutocratie fut attribuée à Polanski en regard du ministre de la culture qui le défendit, Frédéric Mitterrand lui-même accablé en retour d’avoir avoué dans un ouvrage auto-biographique l’épisode de sa consommation de la prostitution pédophile, et le président Sarkozy — à propos duquel il y avait des raisons sociales plus adaptées pour le combattre, que l’assaut de la morale confondue avec le renforcement de la pénalisation concernant des faits relevant d’un autre système judiciaire que le nôtre — entraînant à demander un durcissement aligné du nôtre, et des restrictions de la liberté d’expression.

[5Betty Friedan est morte à 85 ans, le 4 février 2006, à Washington. Voir l’article nécrologique du New York Times du 5 février 2006, où l’on remarque la misogynie à l’égard des femmes qui revendiquent leur existence à part entière toujours actif aux USA, y compris venant de femmes de la nomenclature culturelle, jusque dans les colonnes du New York Times où la journaliste Margalit Fox entache son hommage posthume en accablant l’engagement féministe de Friedan d’une frustration amoureuse préalable, pour décrédibiliser la beauté de son engagement collectif et l’impact de son rôle dans l’histoire sociale des USA, comme si cela seulement pouvait expliquer son combat radical pour l’égalité des droits dans la société conformiste de la famille oppressive, pendant la guerre froide.

[6À ma connaissance, ce livre n’a pas été traduit en français, même si son titre et ses concepts furent souvent exploités en France. Cela peut être dû à un protectionnisme des ouvrages féministes de Simone de Beauvoir par son éditeur Gallimard — Le deuxième sexe, « le livre fondateur du féminisme en situation », inaugural de la possibilité d’appliquer la lutte des classes à la condition féminine, et au-delà, inspirant la théorie de la libération des peuples colonisés, chez Fanon, celle des minorités sociales, chez Malcolm X, celle des homosexuels chez Genet, avait paru en 1949.

2 Messages

  • "proposer une critique (...) en évitant l’écueil de la suggestion sociale " Est-ce vraiment possible ?

    • J’avoue que c’est impossible sauf dans la légende de Kuala Lumpur. Mais il ne s’agit pas de remettre en cause le trajet remarquable d’activiste de Mona Chollet et de ses engagements éditoriaux et rédactionnels magistraux que bien sûr je respecte au premier plan de l’activisme français et que je prends en référence la plupart du temps.

      Simplement on ne peut être groupie ni passer sous silence les petites failles ou engagements idéologiques — car personne n’est parfait — qui teintent d’opinion un article de point de vue. Et du coup passant du plan relatif au plan de vérité, philosophiquement, ça me gêne (la notion même de vérité universelle me gêne). Sans faire le genre de réponse que je me suis permis parmi d’autres de faire par ce texte, autres qui en ont souvent perdu le réflexe sous la force de l’habitude corporatiste de la pensée qui fait taire les profanes du discours, quant à moi au risque personnel de paraître individualiste ou méchante, alors le camp critique s’endort sous ses ténors, et peu à peu la vie critique disparaît. Voilà pourquoi j’ai fait cet article non pas contre Mona Chollet mais contre l’idée que dans le même camp elle soit incontestable... autre forme d’activisme.
      J’espère de tout cœur, sincèrement, qu’elle n’en a pas pris ombrage (si elle est au courant).

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