Pour les Grecs et les Romains, l’amour est une maladie dont Platon, dans « Phèdre » et le « Banquet », nous dit qu’il s’agit d’une fureur qui va du corps à l’âme. A quoi Platon ajoute un autre type de fureur divine, un ’délire divin’, l’enthousiasme, qui nous porte vers dieu :
« L’Éros, c’est le Désir total, c’est l’Aspiration lumineuse, l’élan religieux originel porté à sa plus haute puissance, à l’extrême exigence de pureté qui est l’extrême exigence d’Unité. Mais l’unité dernière est négation de l’être actuel, dans sa souffrante multiplicité. Ainsi l’élan suprême du désir aboutit à ce qui est non-désir. La dialectique d’Éros introduit dans la vie quelque chose de tout étranger aux rythmes de l’attrait sexuel : un désir qui ne retombe plus, que plus rien ne peut satisfaire, qui repousse même et fuit la tentation de s’accomplir dans notre monde, parce qu’il ne veut embrasser que le Tout. C’est le dépassement infini, l’ascension de l’homme vers son dieu. Et ce mouvement est sans retour. » (Denis de Rougemont, « L’Amour et l’Occident », 1938)
Dans le Banquet, Platon expose différentes conceptions de l’amour telles que les protagonistes de ladite réception — qui eut lieu seize ans auparavant et à laquelle ni Platon, ni ceux qui la lui racontent n’ont assisté — les ont échangées. Ces divers éloges de l’amour ont pour but de permettre à Platon d’avancer, notamment, sa conception de l’être humain à travers le discours d’Aristophane sur le mythe de l’androgyne.
Ce magnifique dialogue aux sept convives (Agathon, Pausanias, Aristophane, Eryximaque, Socrate, Aristodème, Phèdre et Alcibiade) eut une importance considérable dans le nouvel essor, à partir de la traduction de Marsile Ficin au XVIe siècle, d’une vision alternative à l’agapè ou amour chrétien selon lequel il est un gouffre infranchissable entre l’humain et le divin que seul le mariage qui intervient par le sacrement de l’Église peut réduire.
Cette édition des Œuvres de Platon a été traduite par Victor Cousin et publiée en 1846 par Rey à Paris en treize tomes. Dans le sixième tome, aux côtés du Banquet, se trouvent le Phèdre et le Menon. L’ouvrage a été numérisé par Robarts de l’Université de Toronto.
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