Roland Castro est haut en couleurs. Architecte praticien resté militant dans sa conception de l’habitat et l’impact de son métier sur la société, pragmatique, imaginatif, tribun, battant, homme de culture critique et d’engagement solidaire amical à l’énergie exemplaire et mémorable, autant que professionnellement dans le domaine social. D’ancien militant de l’extrême gauche forcément devenant gestionnaire en quête de budgets pour assurer son métier à l’échelle de l’entreprise, comme tous les architectes attachés à des grands projets, il n’a jamais renié ses idées politiques pour autant, quels que soient ses partenaires.
Il ne cache pas avoir engagé une psychanalyse qui dura plusieurs années avec Lacan (comme d’autres militants marxistes-léninistes, quant à lui plus tardivement).
Né le 16 octobre 1940 à Limoges, en 1956 il intègre les études d’architecture dans le cadre de l’atelier Albert, qui regroupe une pléiade de jeunes étudiants de la génération pop, qui commencent à faire parler d’eux, sous l’autorité institutionnelle de l’école des Beaux arts de Paris.
De son côté, il est membre de l’UEC et du parti communiste, dont il est exclus en 1965, après avoir effectué un voyage à Cuba pour découvrir un frais et joyeux communisme à l’aune de la révolution tout juste victorieuse, en 1960. Il rejoint à l’UJCML ses camarades dissidents de l’UEC.
En 1968 et les années suivantes, il est une des figures emblématiques de la contestation étudiante et cofondateur de Vive le Communisme en 1969, alternative délocalisée des comités de base indépendants, critiques de la Gauche prolétarienne, attachés aux universités, qui devient Vive la révolution (VLR) auquel Jean-Paul Dollé participe, mouvement de libération de front culturel commun, d’inspiration anarcho-maoïste particulièrement turbulent y compris en milieu ouvrier, et qui sera réprimé ; peuvent aussi bien s’y retrouver des féministes et des homosexuels déclarés, ce qui n’est pas le cas général des organisations gauchistes, à l’époque.
Ce mouvement tient un journal éponyme auquel ne tardera pas à succéder, à l’initiative de Roland Castro, le fameux TOUT ! ce que nous voulons : Tout, immédiatement symbolique du désir de libération sur tous les fronts, dont Guy Hocquenghem, parmi les activistes les plus connus, est l’auteur du premier édito manifeste « Pourquoi nous nous battons » ; on prête à ce dernier d’y avoir eu l’idée de fonder le FHAR, convoqué par un tract ramené des USA par François Lasquin, et négligemment lancé pour information par un tiers, sur la table de la rédaction, rédigé et signé par le militant du Black Panther Party Huey Newton, au moment de sa sortie de prison, contre la misogynie et l’homophobie notoires de l’organisation révolutionnaire. Comme le Mouvement de libération des femmes (MLF) commence à agir avec énergie, où déjà se pose la question entre les hétérosexuelles et les homosexuelles, il ne reste qu’à former un front homosexuel d’action révolutionnaire (ces nouveaux activistes, au début infra-révolutionnaires, sont ceux qui combattent les organisations qui les ont fait taire ou mentir sur leur existence singulière).
Finalement ce front sera formé au moment de la dissolution de Vive la révolution, en 1971.
Ainsi, Roland Castro se trouve impliqué au carrefour de toutes les révolutions du "désir de révolution" en débat, dans les mémorables années de la contestation.
Alors qu’il est enseignant à l’École d’Architecture de La Villette, en 1974, il est lauréat du concours pour l’aménagement de la prison de la Petite-Roquette, projet qui symbolise pour lui une nouvelle approche de l’urbanisme. Il ouvre son agence (devenue en 1988 l’atelier Castro-Denissof-Casi) en 1979.
Mitterrandiste en 1981, il créé avec l’architecte et urbaniste activiste au sein du parti socialiste, Michel Cantal-Dupart, une structure d’intervention et de réflexion sur les banlieues, qui sera à l’origine du projet "Banlieues 89", auquel participera avec eux Jean-Paul Dollé. Ce projet tournera court au moment du second septennat. Délégué à la rénovation des banlieues auprès du premier ministre en 1983, il démissionne du Parti socialiste pour protester contre l’entrée de Bernard Tapie au gouvernement. Il retourne au Parti Communiste.
Il contribue au réaménagement des grands ensembles, privilégiant un habitat collectif de maisons superposées qui permettent l’appropriation individuelle des logements. Il réalise la rénovation des cités des Hauts-de-Seine à la demande de Charles Pasqua, qui trouve pertinent son travail dans les autres municipalités.
Les résultats de Le Pen à l’élection présidentielle le poussent à créer en 2003 le Mouvement de l’Utopie Concrète, dont il est le président. En 2007 il souhaite se présenter à l’élection présidentielle, mais ne pourra pas par manque de parrainages suffisants.
Convié par le président Sarkozy à constituer une étude sur Grand Paris dans le cadre du ministère de Christine Boutin, il dirige la commission de réflexion dont le rapport est rendu en 2009.
Parmi les distinctions professionnelles qu’il a reçues :
— Le Grand Prix des Lieux de travail pour l’usine Thomson CSF à Marseille (1986)
— L’Oscar national de l’architecture pour le Musée archéologique de Sallèle-d’Aude (1993).
— La Pyramide d’or pour l’ensemble immobilier de la Joliette à Marseille (2004).
— La Pyramide d’argent pour la ZAC-Jean-Rostand à Bobigny.
Bibliographie :
– Civilisation urbaine ou barbarie (éd. Plon, Omnibus, coll. Non fiction, 1994) et a contribué parmi les auteurs de l’ouvrage collectif de l’agence Vu :
Misère urbaine, la faim cachée, avec
Jean-Christophe Rufin, Jacques Attali, et la photographe Jane Evelyn Atwood (coll. Album, éd. Au diable vauvert, 2006).
– (Voir sa bibliographie complète @ wikipédia Roland Castro).
Sa biographie signée par Muriel Favre in overblog.com.
Roland Castro in Walrus
Suburban Renewal / A French architect remodels public housing, and perhaps the presidency (2007)
Roland Castro (MUC) répond aux des Gars de la Royal (vidéo @ dailymotion)
Voir en ligne : Le site de l'atelier Atelier Castro Denissof Casi