[1] indices
La structure
parfaite
réitérée
s’étire
à l’infini
Un demi-cercle
tranche
un demi-cercle
qui tranche
un demi-cercle
et caetera
A l’infini
Ce parking n’a pas de fin
non plus
il n’y a pas d’air
pas de vie
rien que des cailloux
et ces structures
étranges
répétées
A l’infini
Le monde entier a disparu
il ne reste que ça
des traces
d’avant
De
quand
les hommes
existaient
là
sur ce sol
nu
De
quand
ils fabriquaient
des choses
des vélos
des structures
pour les accrocher
en toute
sécurité
De
quand
ils extrayaient
du métal
de la terre
qu’ils le tordaient
brûlant
liquide
dans de grandes
machines
pour lui donner
la forme
adéquate
Alors
dans ce monde
nouveau
minéral
sans début
sans fin
les demi-cercles
succèdent
aux demi-cercles
indices
limpides
laissés
pour
Personne
[2] le bourgeon
Le forgeron
trempe la tige
de métal
dans les braises
l’eau du feu
la lave
de ses scories
Il la sort
fumante
l’installe
sur l’enclume
et la tape
du plat
du maillet
des étincelles
jaillissent
de sa surface
orange
profond
Incurvant
légèrement
sa main
il frappe
de plus belle
la tige
Une boucle
se forme
s’épanouit
en un bourgeon
délicat
[3] le grand souffleur
Où est le grand souffleur
qui donnerait vie
et musique
à ces tuyaux
Où est le grand souffleur
qui donnerait sens
à leurs solitudes
Leur surface interne
nacrée
ne brille
que pour eux
leurs sons intimes
qui
les entend
Ils parlent
l’un
à
côté
de
l’autre
marmonnent
dans leurs barbes
métalliques
Leurs voisins
ne les écoutent pas
Un doux murmure
indistinct
imprègne
l’agglomérat
réverbération des sons
sur les tuyaux
Ce son
ténu
mêlant
mille voix
se perd
dans le vide
qui attend toujours
le grand souffleur
qui donnerait
vie
à ces tuyaux
solipsistes
les unirait
et ferait
d’eux
un orgue
vibrant
puissant
éternel
[4] une bulle
Une bulle
crève le métal
de la stèle
Artificielle
sans surprise
elle trace
en double ligne
le contour
d’un destin
Celui qui est
là
derrière
est en
paix
Forcément
[5] il rétrécit
Il rétrécit
son corps
change
mute
ses cellules
se tassent
sur elles-mêmes
deviennent
de plus
en plus
lourdes
il prend la densité
de la planète Mercure
peut-être
et continue de rétrécir
Le monde dans lequel il erre
lui
en mouvement
perpétuel
vers la disparition
est
désert
métallique
ses couleurs
surréelles
lui brûlent les yeux
Il escalade
une crête coupante
qui n’en finit pas de grandir
sous ses pieds
essoufflés
lève la tête
et très loin
au-dessus de lui
aperçoit
un phénomène
étrange
une masse de chair
grande comme le monde
juchée
sur la terre
comme si
elle
n’était
qu’un
vulgaire
tracteur