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Je t’ai construit dans la promesse 

mercredi 5 novembre 2008, par Francis Coffinet

*

La nuit se déroule en nous

encercle la pensée

lui donne la paix du constrictor.

*

Le feu prend tout son poids

ainsi s’explique l’orage infime de sa cime

et lorsque je parviens à me poser sur le fil d’Isis

je le contemple de mon vide,

toujours à portée de poing

à portée de rose.

*

Pour l’abandon

ne fais confiance à personne

il te faut te déserter toi-même.

*

Nous avons atteint

les strates les plus enfouies de la parole,

les grandes amours souterraines.

Notre peau de vieillard est plus lisse que la soie

mais dès qu’un mal nous touche

l’étoile à cinq branches revient herser nos chairs.

*

J’épingle ta chrysalide

sur le bourgeon vide de la matière.

Je rêve de toi

tu es le dormeur et le fruit

tu ne perçois le monde que par tes cils et ton sourire.

Une lumière trace ses sillons sous ta peau,

elle révèle l’envers de ton soleil.

*

Je n’utilise pour le combat que des armes creuses :

la fièvre, l’écho.

Pour garder sur les doigts les empreintes du ciel

Je saisis en son vol le bombyx par les ailes.

*

Comme si la mort venait parfois uniquement

pour prendre notre mesure

les quatre éléments

unis dans l’accomplissement de l’ovale.

*

La cicatrice pariétale

la même, découverte à Lascaux

et sur le front de ce garçon

retrouvé

respiration éteinte dans la froideur de l’aube

et sans cesse ce balancier au creux de mon ventre qui répète :

“cette œuvre est celle d’un enfant

cette œuvre est celle d’un enfant.”

*

Elle inocule notre sommeil

dans la chair mouvante du temps

la minuscule errante

qui se souvient si bien de nous.

*

Je mords le vide

le membre absent

n’adhère ici que le sang marqué de l’entaille—

c’est le flux impur

qui engage la rotation

le monde ne se met à l’œuvre

que dans nos veines les plus basses

et pour que nul ne le fuie

on a noué un drame à chacune de ses extrémités.

*

Je laisse entre nous autant de distance

qu’il y en a d’étoile à étoile,

je pulvérise un brouillard de salive sur toute la planète

mais rien n’y fait

tu ne lâches pas un seul de mes neurones

tu serres mes cordes vocales dans ta main

tu me retournes comme une carte à jouer.

L’éclipse d’un seul doigt

entraîne autant de bouleversements que celle d’un astre.

*

Je t’ai construit dans la promesse

toi

qui porte ta couronne au centre de ton œil.

*

Ici un homme, sans cesse, se remémore

tous les noms des vivants

dès qu’il en oublie un

un autre homme, plus haut situé sur le versant,

l’accueille en sa mémoire

ainsi, toujours, quelqu’un veille en amont.

*

Nous traversons les corps dans leur longueur—

mais certains prennent le monde d’épaule à épaule

d’iliaque à iliaque.

Les plus pervers usent de la diagonale,

voire de quelques médianes plus dissimulées encore.

Dieu, lui s’est extrait du jeu de la ligne

il se fixe en notre centre

et veille à notre giration.

*

Je viens d’isoler une nouvelle substance,

la matière va, une fois encore,

se diviser dans notre pensée—

Nous pouvons recommencer le travail.

*

J’ai senti

les deux grands à-coups

du recul de la nuit

j’ai dû prendre l’enfer,

quelques milliers de volts,

sur l’ongle.

*

La réelle abstraction

doit te donner des ecchymoses.

*

Je bois la substance pure

je me maintiens à la racine

je gèle des songes mille fois plus fins

que des capillaires sanguins

— c’est au lieu le plus étroit de la torsion

qu’apparaît la formule la plus juste—

En moi se meuvent des enfants

qui verront le jour en d’autres galaxies.

P.-S.

Bibliographie :

Le corps s’occulte, Brandes
Instants, Brandes
D’air et de boue , Librairie Bleue
La terre et la tempe, Librairie Bleue (bilingue bulgare - français / traduction N. Kantchev )
L’argile des voyous, Mont Analogue
Une aiguille dans le cœur, Le Givre de l ‘ Eclair
Contre le front du temps, Mont Analogue
Marche sur le continent en veille, Librairie Bleue ( bilingue roumain - français / traduction H. Badescu )
Je t’ai construit dans la promesse, la T.I.L.V. Anagrammes (bilingue anglais - français / traduction P. Nolan)
Aux effluves comme aux estuaires, Le Givre de l’Eclair
Les armes du silence, L.Mauguin
Les fleuves du sixième sens, B. Dumerchez
Epreuves Chamaniques , Alidades

Adaptation de Printemps et ashura de Kenji Miyazawa
Traduction de Françoise Lecoeur - Fata Morgana
Livres d’artistes :

Une fleur sous l’acide, avec Jean-Pierre Thomas
En une seule nuit, La tiédeur des formes, La mystique du rossignol, Brocéliande : quatre livrets numérotés manuscrits et peints par J.P. Thomas Collection « Papillons »
Ligne de vie en rhizome, avec quatre gravures de Thérèse Boucraut
Une grande résolution vibrée, La table des simples, Un champ de sel où tu te roules,
( Les éventails Mallarmé, avec J.P. Thomas )
J’incise le défi, Editions du Mauvais Pas ( lithographie de Jérémy Chabaud)

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