- 13 juin 2011, par Nicolas Boldych
Le visage informe du destin
Gabriel avait l’impression d’avoir vécu la moitié de sa vie dans les halls des aéroports ; il ne savait plus où était l’ombre et où était la lumière, à quel air se vouer, ni à quoi servait ses fines narines de lièvre à force d’être sous les flamboyances factices de ces villes en dehors de la ville, campement de plastique, verre, métal, où s’affairait une société (…)
- 31 mai 2011, par Abdelwahab Boumaza
Le bidon qui tenait lieu de poubelle et que traînait Khadidja, devait être lourd, plein d’ordures, car, d’habitude, du haut de ses quatre ans, elle le portait magistralement, traversait la route et le déversait dans le terrain vague. Maintenant, voilà des déchets qui tombaient du bidon et la suivaient, formant une ligne allant de la maison à l’autre côté de la route. La petite fille aimait (…)
- 17 mai 2011, par Abdelwahab Boumaza
On l’appelle Boudiner, non pas Boudinar (l’homme au dinar), mais Bou-di-ner, c’est-à-dire boule de nerfs. Boudiner, donc, est un sobriquet, — en vérité son prénom est Mourad —, que lui ont collé ses collègues, car un rien l’irrite, le fait plonger dans les filets de la nervosité, le fait jaser. Surtout quand il est au volant. Et puisqu’il est chauffeur de taxi à Constantine, donc, il l’est (…)
- 13 mai 2011, par Abdelwahab Boumaza
Le taxi s’arrêta, je payai le chauffeur et descendis. Je revenais d’un long voyage, et la fatigue me terrassait, je ne pensais qu’à dormir, à sombrer dans le plus profond sommeil. Il était dix heures, et le groupe d’hommes debout devant l’entrée de l’immeuble m’intrigua. J’ai horreur des salamalecs, surtout quand il y a beaucoup de gens. J’évitais le plus souvent possible de m’y adonner, (…)
- 12 mai 2011, par Stéphanie Hochet
Je crois que l’automobile est aujourd’hui l’équivalent assez exact des grandes cathédrales gothiques : je veux dire une grande création d’époque, conçue passionnément par des artistes inconnus, consommée dans son image, sinon dans son usage, par un peuple entier qui s’approprie en elle un objet parfaitement magique.
Roland Barthes, Mythologies.
Encore deux heures de route. Il n’y (…)
- 9 mai 2011, par Emmanuel Steiner
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sorti d’un tunnel à la voûte arrondie, il longe un panneau sur lequel est inscrit pneus toutes marques, puis arrive devant un immeuble d’une vingtaine d’étages, au pied duquel se trouve une station-service, ainsi qu’une enceinte où ne subsistent plus que les murs porteurs, disposés en triangle, d’un ancien édifice, à proximité d’un échafaudage permettant d’accéder à des affiches (…)
- 28 avril 2011, par Frédéric L’Helgoualch
Je le côtoie maintenant depuis trois ans mais, malgré tout, continue d’être surpris par sa haine et sa noirceur. Critiquer, moquer, salir, ridiculiser, humilier, tout, tout le monde, tout le temps : cela semble pour lui représenter une forme avancée du bonheur. Il parle vite, très vite, comme pour ne pas laisser s’évaporer la saloperie nouvellement germée dans sa boîte à insultes. Il la (…)
- 27 avril 2011, par Emmanuel Steiner
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il descend l’avenue S comme presque tous les jours, et quelle n’est pas sa surprise lorsqu’il passe devant cet avis scotché sur la vitre du bar-tabac :
C’est avec une grande tristesse que nous avons appris le décès d’Alain.
Il venait d’avoir 55 ans.
Beaucoup d’entre nous le connaissaient depuis plusieurs années, certains depuis quelques mois. Tantôt chez les uns, tantôt chez (…)
- 1er avril 2011, par Henri Cachau
Depuis le tonitruant passage de Bukowski sur leurs plateaux ils ne servent que de l’orangeade lors des émissions culturelles, dommage pour les Chablis et autres Pouilly-Fuissé. Malgré ce manquement à la déontologie et la légendaire bégueulerie de ce genre de programme, un amateur éclairé s’y était inscrit afin de participer à l’un de leurs forums intitulé : « L’Art n’a nul besoin de prédicats, (…)
- 31 mars 2011, par Abdelwahab Boumaza
« Le rhume nidifie dans mon nez. » C’est ce que disait Salim à qui, le voyant en train de se moucher, lui demandait ce qu’il avait. Eté comme hiver, son nez coulait, et il se mouchait, devenant un grand consommateur de mouchoirs, ceux en tissu ou en papier. Et il ressentait même de temps en temps une douleur lancinante entre les sourcils. Le médecin, qu’il avait consulté, obligé de le faire (…)