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UNE SAISON
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JUILLET
La nuit m’emporte
comme si j’étais léger
Un espace immense —
Le ciel s’y enfonce, sans un bruit.
AOÛT
Chaleur et lumière intense sous les falaises
Insectes rares
Le soleil, toujours (l’esprit de l’ouest)
Construction d’un édifice au bord de l’eau.
SEPTEMBRE
De ce peu de choses
juxtaposées
naît une force d’évidence
difficile à nommer
réunissant à elle seule le sensible d’une oreille incendiaire
De ce peu de choses récoltées
(un animal à la recherche de graines pour se nourrir)
Le monde — traversé par une flèche refusant de tomber
Un éclair
Mais bientôt viendra l’heure de la mort.
OCTOBRE
Je lève les yeux
Le vent emporte les nuages
Un vol d’oies sauvages se dirige lentement vers le sud
La Terre est immobile.
NOVEMBRE
1.
Face à l’ouest
Les arbres, comme des griffes
dansent avec le ciel
L’hiver s’approche
L’espace glacial est encore plus glacial.
&
2.
Me voici dans la montagne
à la limite de la roche et des arbres rares
Éloigné de toute vie trop agitée
Plus aucun son, ni mouvement
Seul cet agrégat nuageux, vers le col
défile, invariable
comme une lente sécrétion.
DÉCEMBRE
Il neige
J’observe le cycle des saisons
Je reste immobile
Je suis une pierre.
JANVIER
Les herbes dansent
La vitesse s’accroît
Les couleurs changent
Le ciel rejoint la Terre
Hautes collines de buis où chantent quelques rares insectes
Le ciel prend feu
bien qu’il fasse de plus en plus froid
Herbes sèches Gramineae (nourriture essentielle)
quelques coquelicots recroquevillés, quelques chardons secs
L’étendue s’inscrit dans mon œil
Je me déplace
La montagne s’écoule.
FÉVRIER
Chaque jour le feu rayonne
Chaque jour
il nous transforme
À cet instant, celui qui parle
semblant dormir soudain s’éveille
Il laisse venir tout un peuple à ses côtés
Marcher ainsi —
Sur la neige, une ligne
dessinée dans la lenteur du froid pénétrant.
MARS
Comme un torrent
bruyamment
pénètre les roches et la forêt
Une force glaciale
Le souffle
Comme un torrent, tout là haut
depuis l’espace immobile.
AVRIL
Un corbeau, ce matin, très tôt
Le ciel
La pluie tiède
Cet horizon blanc où l’astre chute.
MAI
Accepter la peur — elle s’enfuit
Espace silencieux
Rêve cruel.
&
JUIN
Cavalcade sous les falaises
Ma tête est blanche, mes os sont blancs
Je finirai blanc —
Le poème
La multitude.
…/…
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