
Blankfein… sombre présence au Palais de l’Elysée.
SARKOZY ACCUSÉ DE COMPLICITÉ D’"EMPOISONNEMENT" [7]
FACE À LA BOMBE ÉLECTORALE DU F OAT [8]
FACE À LA BOMBE ÉLECTORALE DU F OAT
**Le Slog souligne la menace réelle de la France par les échanges obligataires souverains à terme...
Lloyd Blankfein, Morgan Stanley, la dette française et Nicolas Sarkozy : quels que soient les motifs, il y a ici tous les éléments essentiels d’un énorme scandale.
Le Slog soutient dans les termes ci-dessous le malaise croissant dans les cercles politiques français majeurs à propos de « L’affaire des FOAT ». Il montre que l’animateur de marché de contrats à termes Morgan Stanley a clairement un intérêt acquis dans l’utilisation du nouveau secteur — qui sera lancé le 16 avril — aux dépens graves de la France. Et il examine certains des faits les plus étonnants qui reposent sous les soupçons de la gauche française, à propos d’une implication de Sarkozy dans le lancement du nouveau marché des FOAT, pour ce pays.
Hier, Le Slog a posté un en-tête spécial « bêtisier » citant le Président français Nicolas Sarkozy, qui disait à l’électorat français que la seule alternative à sa re-élection serait « un désastre financier ». Je m’amusais de l’hypothèse sous-jacente derrière les prétentions de Sarko, à savoir que la France ne soit pas déjà « dans le caca ». Mais un Slogger gaulois attira mon attention sur la surprenante rumeur selon laquelle les adversaires de Sarkozy étaient véritablement inquiets.
Il existe un mot en français, « attentat ». Difficile de le traduire exactement, mais en général cela signifie « une attaque ignoble » — le plus souvent par rapport à un « coup violent », bombe ou assassinat. Quoi qu’il en soit, comme les élections françaises approchent — et Nicolas Sarkozy face à une défaite annoncée — un nombre croissant d’observateurs en France commencent à ressentir l’arrivée de ce qu’ils considèrent comme un « attentat financier ».
La seule chose dont nous devons nous préoccuper ici (comme toujours dans le monde d’aujourd’hui) est : que se passe-t-il ? Est-ce juste un peu plus de cupidité et de folie de trader ? Ou est-ce une attaque ignoble par la politique de la terre brûlée contre la prochaine présidence de François Hollande... du fait de Sarko et ses alliés dans l’élite mondialiste ?
Je ne prétends pas être un expert dans cette histoire, mais le bon côté est au moins que vous soyez en mesure de comprendre ce que j’écris — par opposition à la lecture des paragraphes bondés de sottises jargonneuses qui essayent de cacher l’insanité fondamentale en cause. Prose, par exemple, comme ce genre de chose de Ciaran O’Flynn, co-responsable du négoce sur les Fonds d’État européens, chez Morgan Stanley — qui agira en tant qu’animateur du marché du nouveau secteur des contrats... à terme sur les obligations françaises :
« Il y a une demande dans tous les marchés pour des instruments multiples de commerce car cela crée des opportunités d’arbitrage, qui peuvent améliorer la liquidité dans toutes les versions du marché. »
Toujours se méfier de toute idée qui ne dit pas simplement ce qu’elle est... tout le contraire de ce que je vais faire maintenant : les contrats à terme sont simplement un autre botté de dégagement pour les maniaques de la traction des machines à sous [9]. Ou plutôt, dans ce cas, pour tirer leur coup [10] : les paris faits avec des contrats à terme d’une durée de 8 à 12 ans, sur les Obligations Assimilables du Trésor Français (OAT F).
OK jusque là ? Bon. Le seul problème pour ceux d’entre nous qui sommes informés en la matière, c’est que ces produits ont tendance à apparaître juste avant que quelque chose de mauvais n’arrive. Parce que, dans la zone euro, les prix des obligations et des rendements diffèrent massivement selon que vous soyez en Allemagne ou en Grèce — c’est-à-dire solvable ou en faillite. Les étapes entre les deux sont appelées Italie, Portugal, ou Espagne.
En quelque sorte c’est l’histoire de l’œuf et de la poule : lequel arrive en premier ? Mais fondamentalement, si vos finances nationales ont l’air de partir en vrille, il y a toujours un abruti quelque part pour y voir un moyen de faire de l’argent en pariant dessus. Il y a ou il y a eu des secteurs florissants de contrats à terme souverains dans tous les PIGS [11]. En toute logique, il relève du bon sens de constater que, s’il y a assez de gens pour avoir intérêt à vanter les dangers et les rendements, concernant une dette d’État, c’est qu’alors une prophétie auto-réalisatrice est en cours : tous ces profiteurs abjects que sont les firmes de Fonds Vautour vont investir dans l’évolution du marché à la vitesse de la lumière pour rendre leurs paris profitables [12]... avec l’effet secondaire malheureux de faire d’un problème de finance nationale précaire un cas désespéré de cul-de-jatte amputé des bras [13].
Ce syndrome précis a été le plus gros problème auquel Mario Monti fut confronté, lorsqu’en implant in situ de Goldman Sachs il reprit l’Italie. Or étant un vétéran de GS, Monti savait ce qu’il traitait, et il déversa devant lui un torrent éblouissant de données fausses et de bonnes nouvelles telles que, pendant une semaine ou deux, il réussit à persuader quelques commentateurs que l’Italie allait survivre et prospérer. Seulement maintenant les marchés sont totalement avertis que rien n’a changé là-bas, si ce n’est que les choses aient empiré.
Le 16 avril — juste avant le premier tour de l’Élection Présidentielle française, — la France deviendra un membre de ce club malheureux avec un marché de contrats à terme obligataires. D’où que beaucoup de gens à Paris se demandent si Sarko parlait au sens propre en évoquant un « désastre financier ».
Bien sûr, cela pourrait simplement être une théorie du complot gauchiste essayant de présenter le Nabot comme si, incroyablement méchant, placer la survie de ses copains de l’élite mondiale devant celle de la France le rendait pleinement heureux. Mais d’autre part, ce faisant la Gauche est au bon guichet [14], parce que mes propres recherches dans le milieu culturel de Sarkozy (suivre le lien) suggèrent que de telles observations à son sujet soient entièrement exactes. Par de nombreux aspects, Sarko est une sorte de financier américain qui se cache.
Mais puisqu’on parle de Goldman Sachs, voici un détail intéressant : la petite main personnelle de Dieu [15], Lloyd Blankfein, a été reçue à l’Elysée en novembre 2011, où elle eut une longue réunion en tête à tête avec Nicolas Sarkozy. Il n’y a eu que le Figaro pour relayer l’information, mais sans s’étendre sur ce que Lloyd faisait là — je veux dire : la raison pour laquelle Sarko accorda autant de son précieux temps à un banquier de Wall Street.
J’ai blogué intensivement le mois dernier sur le bras long de Geithner [16], et d’Obama (suivre le lien) en relation avec la proposition d’amputer la Grèce... C’est ça l’anomalie de ce qui s’est produit, mais ensuite chacun a dit « Regardez plutôt par là ! » Et tout à coup ce ne fut plus une anomalie désormais. Ceci n’est pas une paranoïa de la conspiration, c’est une réalité géopolitique. N’ayez aucun doute là-dessus : si l’Europe part en morceaux l’Amérique sera sur le cul. De la même façon que l’an passé ils bombardèrent la monnaie iranienne pour obtenir qu’Ahmadinnejhad revienne à la table des négociations, partout en Europe les arrangements américains sont conçus pour assurer la survie des « bons » leaders... disons, les leaders qui feront ce qu’il faudra pour protéger les banques américaines, et construire les pare-feu dont elles croient pouvoir protéger les États-Unis des effroyables obligations de leur propre dette.
Tout cela nous renvoie parfaitement aux banques américaines et à leur calendrier — parce que Wall Street a toujours un plan. Cette visite de Lloyd Blankfein à Nico arriva à la suite de nouvelles très mauvaises pour plusieurs sociétés bancaires de Wall Street. Principalement, après les pertes faites sur le renflouement de Dexia (très coûteux en effet, tant pour la France que pour Goldman), les marchés sont devenus nerveux à propos de l’exposition à risque de Wall Street sur la dette de la zone Euro. Le 1er novembre, l’année dernière, Bloomberg (suivre le lien) enregistrait que :
« ... cinq sociétés avaient une exposition à risque pour un total net de 45 milliards de $ sur la dette de la Grèce, du Portugal, de l’Irlande, de l’Espagne et de l’Italie, selon des révélations faites par les sociétés à la fin du troisième trimestre... Ce sont JPMorgan, Morgan Stanley, Goldman Sachs, Bank of America Corp. (BAC) et Citigroup Inc. »
Ah... Oui, Goldman et Morgan Stanley sont là-dedans. Peu de temps après, le patron d’une de ces firmes rend visite à Nicolas Sarkozy. Et après tout ça, la direction des contrats à terme d’euro-obligations de Morgan Stanley annonce le lancement de « Vous Savez Quoi ».
Morgan Stanley est le choix évident, car il a le plus à perdre si la France passe en-dessous. Notez cet extrait de CNNMoney, le 3 octobre 2011 (suivre le lien), où l’on demande si MS sera « le prochain Lehman » — c’est moi qui souligne :
« Les investisseurs sont inquiets de savoir quelle exposition à risque Morgan Stanley peut avoir sur la dette souveraine de la Grèce et d’autres des nations soi-disant périphériques de l’Europe. Plus particulièrement, il y a des craintes que Morgan Stanley puisse subir d’importants dommages collatéraux en raison de son exposition à risque sur les banques françaises qui ont de gros liens avec la Grèce et le reste des PIIGS . »
En décembre l’année dernière, les initiés de Street [17] parlaient des investisseurs et des actionnaires qui se « tracassaient pour son exposition à risque sur la dette toxique européenne souveraine ». Morgan Stanley savait qu’il avait un problème ; c’est pourquoi, bientôt, la société annonça que durant janvier 2012 elle avait coupé 40 % de son exposition à risque [18] — et 40 % semble un pourcentage important.
Cependant, regardez les chiffres, et vous verrez ce que fit l’entreprise, soit sortir 40% de l’horrible exposition à risque pour arriver à un risque hautement dangereux : ajouter son exposition à risque de $3.3 milliards sur les banques françaises à celle sur la dette du Club Med [19], ce qui nous donne un grand total entre 6.1 et 6.3 milliards de dollars, somme toute. C’est aussi le moment de devenir qualitatif ici : presque tout est de la dette toxique. Elle ne va jamais pouvoir être payée.
Ce que Morgan Stanley espère créer après le 16 avril est la garantie parfaite pour son entreprise : des masses d’argent pariant sur l’effondrement français, en jouant des masses similaires exposées à cet effondrement. Donc ces politiciens français publiquement soucieux du danger en France ont raison sur le fond : c’est du double jeu [20] classique de Wall Street à son maximum… le genre de conflit d’intérêts qui a rendu tristement célèbre Goldman Sachs.
Cela résonne en moi comme la motivation la plus importante et la mieux démontrée que j’aie vu jusqu’ici dans cette affaire. Or souvenez-vous : aujourd’hui tout est une arme avec laquelle effectuer l’attentat. Imaginez le scénario :
Hollande gagne les élections... ce qui demeure encore le résultat le plus probable, malgré l’exécution d’un islamiste toulousain chorégraphiée par Sarko, il y a deux semaines. Il commence immédiatement le « détricotage » de l’union fiscale de Merkel (FiscalUnion), ralentissant sa progression, et dénonçant comme manifestement erronée la stratégie d’austérité de la Troïka Club Med.
C’est un désastre potentiel pour la dette américaine, pour les entreprises américaines, et pour la « certitude » de la réélection de Barack Obama. Donc on n’est pas dépourvu de mobile ici : « nous ne pouvons pas laisser la garde de la couronne à Hollande ».
Mais supposons, à la seconde où François le terrible est élu, le nouveau groupe des marchés à terme du FOAT prenant mal la nouvelle... avec l’aide de la FED (la banque fédérale américaine) ; et là, pariant à fond sur le fait que Hollande mette tout en l’air et mène davantage l’Europe dans le chaos. Bon boulot pour Morgan Stanley, et mauvaise nouvelle pour le Parti Socialiste.
Les ondulations extérieures de la vague s’étendent à deux ou trois banques françaises devenant désespérées. Triple rendement des marchés obligataires français. La France vire au Club Med... Zut alors, quelle horreur et Dieu du ciel ! C’est une catastrophe. Sauve qui peut ! Que peut-on faire ? [21]
Bon... Pourquoi ne pas mettre Christine Lagarde comme Ministre de l’Économie et des Finances : le visage acceptable de la France du FMI ? D’accord, elle est dans la poche des Américains — mais le bon point est qu’elle n’ait jamais travaillé chez Goldman Sachs. Quel soulagement : il s’agit d’un gouvernement d’unité nationale — tout comme en Grèce. On est sauvés. C’est un miracle.
Ça vous paraît exagéré ? Peut-être. Mais nous allons appliquer quelques techniques d’investigation classiques, à la Maigret :
La Troïka incriminée a une forme : l’implant grec de Goldman à Athènes, référendum abandonné, élections retardées ; l’implant italien de Goldman à Rome ; l’implant de Goldman dans la BCE ; en Pologne, Geithner bave et débite à propos des bazookas ; l’attaque sur le rial iranien ouvertement admise.
La Troïka — en réalité les États-Unis et l’Allemagne — a un motif : la contamination critique de l’eurosecteur bancaire coulerait les USA, et la dernière chose que veulent les Américains est un mangeur de grenouilles communiste [22], faisant tourner court toutes ces fantaisies d’analyses du parcours critique attribué d’excellence par le FMI.
Sarkozy a une forme et une motivation : les énigmes qui demeurent dans la destruction de DSK en tant qu’adversaire (suivre le lien), le rôle avec la Réserve Fédérale (américaine — la FED) pour obtenir que Lagarde ait le job du remplaçant, les antécédents du type prétendument monétariste soutenant la prééminence mondialiste : tout ceci suggère que Nico puisse bien être en quelque sorte une connerie — dans les deux sens du mot « con » en anglais et en français.
Les données de l’observation : les problèmes auxquels Morgan Stanley a été confronté après septembre 2011, une visite de Blankfein à l’Élysée en novembre, l’annonce des FOAT en mars, leur lancement au moment où on entre dans les élections, la création d’une carte verte de sortie de prison pour MS.
De loin, des choses beaucoup plus folles que celles-ci se sont avérées finalement vraies. Pour le moment, l’élément géopolitique reste dans le domaine de la spéculation informée... quoique l’on en vienne aux questions — sont-ils capables de le faire et en ont-ils les moyens ? — et la réponse est un retentissant : « Oui ».
Cependant, la position de Morgan Stanley a tout, je crois, pour inquiéter à juste titre l’élite française — je veux dire la France réelle, pas des versions bidonnées comme Sarkozy et Lagarde. Le comportement, la motivation et les gains apparents, pour l’entreprise en question, sont tellement évidents qu’au moins dignes d’une investigation sérieuse par les régulateurs français... même si j’imagine qu’il soit déjà trop tard pour maintenant.
Peut-être que l’argument bancaire solide de l’« Affaire des FOAT » présenté ici, dans Le Slog, convoquera une préoccupation encore plus largement diffusée que l’évocation dans le site populaire Rue 89 (suivre le lien), hier, après que les candidats aux Présidentielles Jean-Luc Mélenchon et Jacques Cheminade aient parlé avec intensité d’« un nouveau coup des financiers contre la France », et d’« une offensive mondialiste préparée contre la France ».
Tout ça peut résonner comme des paroles de dingue, mais pour répondre à la question de savoir si la géopolitique est en cause ici ou pas — et si non, pourquoi la rencontre entre Sarkozy et Blankfein à ce moment-clé ? — les Français sont vraiment fous d’introduire juste maintenant un secteur de contrats à terme, lequel de façon réaliste ne peut servir qu’à les aider à descendre, sur la pente glissante vers l’œil du cyclone de la dette.
Ainsi, peut-être que la partie est jouée pour monsieur le Président : « Et alors, Sarko — pourquoi avez-vous permis ce coup de folie [23] ? » [24]
13 avril 2012
Avec l’autorisation de l’auteur.
Liens Liés : L’Affaire DSK – the complete history (suivre le lien).
Source :
Remerciements à Elli Medeiros et à Thomas Schmidt pour leur première lecture critique et patiente de la traduction, et pour leurs suggestions — intégrées aux corrections.
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Based on the translation at www.larevuedesressources.org.
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