TROIS POÈMES À LA VILLE DE NANTERRE
Scène II :’ORPHÉE.
Ce n’est pas elle,
C’est toi, qui de l’hymen, as rompu la ficelle !
Je fus jadis témoin de son amour pour toi ;
Je la vis, te gardant et son coeur et sa foi,
Poussant le dévouement jusqu’à cirer tes bottes,
Quand vous manquiez de fonds, en mettre à tes culottes.’
Scène VIII :
’MÉDÉE, seule.
Oh ! je prévois ici d’atroces gabegies !..
Des choses qu’on ne voit que dans les tragédies,
Et comme Bouchardy jamais n’en inventa :
Je veux du cachet vert en fait de vendetta !..’
VAUDEVILLE FINAL :
’ JASERON.
Un théâtre fait voir, la réclame est subtile,
L’image de Mandrin au public aveuglé ;
Des voleurs illustrés, c’est bien le plus habile ;
Car, même après sa mort, par lui l’on est volé !’
(Th. Cogniard, É. Grangé et Bourdois,
La Médée de Nanterre -
Tragédie fantaisiste en trois parties et en vers de Bohême
- Traduction en gaulois de la traduction en italien
de la tragédie française de Médée,
représentée pour la première fois, à Paris,
sur le Théâtre des Variétés, le 9 juin 1856,
Paris, Michel Lévy Frères, 1857, pp. 2, 6, 8-9)
Kevin (Pour Noël)
’Cet avocat à la serviette
Cette aube qui met la voilette
Pour des larmes qui n’ont peut-être
Ni Dieu ni maître
Ces bois que l’on dit de justice
Et qui poussent dans les supplices
Et pour meubler le sacrifice
Avec le sapin de service
Cette procédure qui guette
Ceux que la société rejette
Sous prétexte qu’ils n’ont peut-être
Ni Dieu ni maître’
(Léo Ferré, ’Ni Dieu ni maître’)
1. Dans mes pompes (funèbres)
Ils m’ont donné un prénom de telenovela états-unienne
Mon éducation s’est faite entre cages d’escaliers et Camel
Je suis fan du PSG ou de l’OM et de Jamel
Quand j’étais petit avec mes parents on regardait Les Nuls à la télé les week-ends
J’ai jamais vu Star Trek The New Generation
Ni SNL tous mes câbles sont Canal Plus
La France est petite avec ses monopoles
Le minitel durant tous les 90’s mini-minus
J’ai fait une formation un BEP de technicien de surfaces
Tête de veau j’ai le diplôme sur la face
Je traîne je zone car il semble qu’on est trop nombreux à être le même
Je vis chez mes parents j’ai jamais arrêté d’être un môme
Jeux vidéos Stephen King Under the Dome
Ici rien ne se passe juste les trains et plus de Hyundai que de BM
J’ai une copine elle est en seconde mais elle fait plus que son âge
Sauf cette fois-là en général on est plutôt sages
Le bébé a trois ans déjà on la partage
La semaine elle reste chez les beaux-parents on ne parle plus trop souvent de mariage
Ceux qui ont des études disent que c’est un rite de passage
Être parents quand on a pas de taf’ quel tapage
En vérité nous on n’a jamais trop rien planifié
C’est pas facile d’oublier les murs gris quand on marche à pied
Mon père il est tourneur-fraiseur ma mère elle est femme au foyer
Elle garde les enfants des autres dans la chambre du fond près de l’évier
Moi sans diplôme c’est possible que je termine coiffeur ou infirmier
L’année dernière j’ai été à un programme social comme ça laver les vieux faire de brancardier
Je connais des PhD. docteurs obligés de s’expatrier
Comme mon vieux dit toujours les études c’est pour les rentiers
Ça sert à rien dans le monde entier
Plus qu’un cerveau vaut mieux être un bon ouvrier
Qu’y dit avec son pack de Kro en regardant Ruquier
Moi je le crois j’ai pas de moyen de comparer c’est pour les héritiers
Ça d’étudier
Évidemment lui il est au chômage technique licencié
Et moi je me fume des joints dans le quartier
Mais je suis bien incapable d’inventer la machine à cogiter
Je n’ai jamais prétendu que je pouvais sauver l’humanité
Moi tout ce que je sais c’est parler fort et cogner
2. Épilogue (sans moral)
Ils m’ont donné un prénom de telenovela états-unienne
Mon éducation s’est faite entre cages d’escaliers et Camel
Je suis fan du PSG ou de l’OM et de Jamel
Quand j’étais petit avec mes parents on regardait Les Nuls à la télé la fin de semaine
La seule chose à bien y réfléchir
J’aime pas ma situation comme je la vois aujourd’hui
Les assistantes sont des putes à collier
Et l’État leur proxénète sur nos deniers
Je me fous des Restos du Coeur je veux pas finir
Comme le Nanterrois ou sans abri
Société irresponsable et pas mal pourrie
Arrête de me donner ce que je veux pouvoir obtenir
J’en ai marre des boîtes périmées et des joggings que ma mère doit recoudre
J’en ai ma claque d’être l’image qui te plaise le plus de ma vie
Laisse-moi une bonne fois résoudre
Mon avenir
Donne-moi un job un plan pour en découdre
Je veux pouvoir choisir
La marque de ma viande et de mon riz
Je veux pouvoir payer rubis
Sur l’ongle ce que j’achète et y mettre le prix
Mon bourreau a ton sourire
Ta torture c’est le RMI
Et on est des millions n’entends-tu point ma colère sourdre
Et à Nanterre l’odeur de la poudre
Et de Nanterre l’odeur de la poudre
Pourquoi t’es tombé
’Devenir méchant ! Mais puis-je seulement devenir quelque chose ? Ni méchant ni bon, ni coquin, ni honnête, ni héros ni goujat. Maintenant j’achève de vivre dans mon coin, et j’achève aussi de m’enrager avec cette consolation : que sérieusement un homme d’esprit ne peut être ni coquin, ni honnête, ni rien, et qu’il n’y a que les sots qui puissent être quelque chose. Oui, un homme du dix-neuvième siècle a pour premier devoir d’être une créature quelconque, surtout sanscaractère : car un homme à caractère, un homme d’action est essentiellement borné. Voilà l’enseignement expérimental de mes quarante ans. Quarante ans ! Mais quarante ans, c’est tout une vie, c’est la plus extrême vieillesse. Dépasser la quarantaine est impoli, banal, immoral. Qui vit plus de quarante ans ? répondez-moi franchement. Mais je vais vous le dire : les sots et les coquins, je le dis en plein visage à tous les vieillards, à tous ces honorables vieillards, à ces vieillards aux cheveux d’argent ; je le dis à tout le monde, et j’ai le droit de le dire, car je vivrai moi-même jusqu’à soixante ans, - jusqu’à soixante-dix ! jusqu’à quatre-vingts !… Attendez, laissez-moi respirer…’
(Dostoïevsky, Carnets du sous-sol, 1864, traduction d’Ély Halpérine-Kaminsky et de Charles Morice)
’Tuez-moi, tuez-moi’
Dit l’assassin
Sur le lieu du crime
On peut bien dire n’importe quoi
Passer à l’acte c’est un tout autre refrain
Un peu comme de l’assurance les primes
Ou bien les je n’aime que toi
Charlatan du matin
Dont on connaît la rime
Mais écoutons l’avocat du Diable
Qui dit Diantre
En voilà bien des ébats
Pour un pauvre minable
Qui n’avait pas assez de ventre
Pour supporter de la vie les hauts et les bas
Est-il au moins pensable
Que refermé le Guignol dans son antre
On nous épargne au moins de tels débats
Qu’on le déguise en blanc en noir ou en sable
Écu jamais ne se pourra prétendre
Et de ces tristes cendres
Soyons raisonnables
On le sait on ne retirera qu’un vilain grabat
Plein de poux et de médiocres abats
Aucune morale on le voit
Qui nous dise enfin
Ce qui nous opprime
Pourquoi en mairie respectable
Un pauvre privé de droit se crut chantre
Main criminelle de Dieu et acheva
Sans remord ni effroi
De nos prélats le chemin
L’horreur venant moins de l’acte que des victimes
Disons-le tout de go à cette table
De l’importance des fonctions devrait dépendre
Le souci que personne ne nous en relevât
Quand a-t-on vu qu’on se souleva
Pour des petits riens comme cette misère qu’on voit s’étendre
Cela est tout de suite mesquin et très détestable
Si l’on permet que les passions s’expriment
Ce sera je le prédis le tocsin
Du status-quo des lois
Mais dans ce bon sentiment de justice
Qui fructifère nous imprègne
Tous et chacun comme société
Donnons la parole à l’avocat de la défense
Bien qu’on le sait il n’aura pas grand chose on le pense
Et la rapidité de sa prise de parole nous fera économiser d’inutiles dépenses
En peu de mots celui-ci résume son expertise
Il s’étonne brèvement que dans l’administration de police
Proprement les prisonniers l’on ne ceigne
Et qu’ils tombent mûrs sous les fenêtres et enseigne
Comme les fruits des arbres en été
Ou comme les dissidents dans les dictatures les plus détestées
Sans jugement formel de leurs offenses
Avec juges jurés et témoins à charge et décharge tout cela en longues et ennuyeuses audiences
Mais voyant le bon côté il s’exclame voilà bien une économie pour la France
Ainsi conclut-il sa plaidoirie sinon vendue du moins achetée
Où nous trempons tous nos doutes pour qu’ils s’y teignent
Trouvant dans ce sens pratique que nous apprend toute crise
Le fondement de finances
Qui permet d’étouffer votre anxiété
Même si sous les coups du marteau de la loi ils geignent
Et si nos oreilles ne sont pas encore assez sourdes pour rendre tout à fait muettes leur franchise
Nous dirons alors bien nous tout le public
En choeur comme un seul homme
Répétant les mêmes chants et les mêmes cantiques à chaque messe
Que pure paranoïa et mauvaise intrigue
Serait d’accuser la misère et la solitude qui énormes
Auraient été ses Charybde et Scylla ses écueils et son ivresse
Rejetons vite contre la vite construite digue
De notre sens commun contre notre La Rochelle Richelieu très catholique
L’hypothèse absurde et informe
Qu’aucune détresse
En vérité dans le coeur et le poing serré comme un cri monotone et autonome
Aient pu décider le doigt qui la gâchette presse
Et le journaliste besogneux
Enduit de gros maquillage
Notre éblouissante idée collective
Il réduit en charpie l’ignominieux
Concept que ses pages
Moquent avec cette ingéniosité si vive
Et qui voudrait que tes paroles réellement décrivent
Et soient de l’actualité le fidèle portrait ta cage
D’où comme tout Rocky tu sors si tu cognes
Mais bien sûr l’assassin de Nanterre comme l’ivrogne
Tombe des mêmes coups qu’il engage
Et seuls les forts les inconscients y survivent
Dans nos honteuses Mémoires du sous-sol
Tu as revu une dernière fois ton Coué
Ton Coelho ton Goldman
Un autre matin pour rien sans que tu t’envoles
T’apprends aux coups de fouet
Du destin que ton intelligence n’est aucune cape de Superman
Alors dans le creuset de tes dols
Enfant adolescent et adulte baffoué
Par tes parents par la société et par les juges Hey man Amen
Et de perdre ton tapis et dans ta caravane
Comme les Rois Mages à ta quête voué
De foutre en l’air au vitriol
Les voleurs et leur système
Mais le journaliste scrupuleux évitera le thème
Il n’oublie pas d’insister
Sur le fait que quand ils t’ont finalement dominé
Tu criais pour qu’on te tue
Cela expliquera tout têtu
Le remord et ta conscience te minaient
Tu n’étais rien d’autre qu’un fracassé de plus de ces assistés
Excité personne ne t’a poussé dépisté
Ton corps comme celui des anges cheminait
Vers la lumière mais comme celui des démons perdu
Il chuta le bon goût voulait voir répandu
Comme au ciné le sang katabase innée
Du méchant avant le générique Disney
Bien sûr notre journaliste oubliera prudemment
De rappeler qu’en évitant un procès
On évitait aussi de trop révéler tes circonstances
Personne ne voulut le relever ni s’appesantir
Le deuil était national comme toujours et un puissant médicament
L’excuse patriotique il est des questions qu’on n’aime pas poser
Était-on tous collabos ça n’a plus d’importance
Avant Harry Baur Max Jacob après Guitry Arletty le silence évite d’avoir à mentir
C’est plus simple de penser que tu t’es jeté ou poussé amicalement
Finalement tu as eu la décence
De savoir sans trop de bruit partir
En mourant bien sûr tu t’accusais
Toi et rien que toi évidemment
On oublie vite et la porte du Pasteur Douet
Dans le malheur une saine délivrance
Dommage qu’avant de faire des tiennes tu n’es pas pu mourir
Une bonne peur mais c’est comme avec les gaz fossiles qu’est-ce qu’un petit tremblement
Si le débat artificiellement créé évite d’en causer
C’est mieux pour nous de le voir en perspective garder notre indépendance
De penser tu sais histoire de ne pas contredire
Dans le malheur des autres gît notre ressemblance
Les codes en commun et les valeurs inopposées
S’ils t’ont tiré vraiment
C’est un cadeau qu’ils nous ont fait pour éviter ton influence
Voilà ce que nous pensons tous je dois le dire
Le juge la police le procureur l’avocat de la défense
Le public interrogé et les célébrités tous l’ont clairement
Dit écrit chanté pleuré revendiqué discuté analysé et exposé
Continuer à parler de tes actes sans jugement
Serait leur donner trop de publicité pour quelque chose plus que glosé
J’y mettrai donc un point final
À la manière de l’Ancien Régime
Le dédiant à mon Sire
Je concluerai de la façon la plus banale
Comme bon je l’estime
En demandant au fond
Pourquoi t’es tombé
Et en répondant sans hésitation
Parce que c’était la meilleure chose à faire dans cette situation
Comme l’ambiance était déjà mauvaise et la Maison avait flambé
Y mettre encore de la discussion
C’était pas possible y fallait un plan B
L’unique technique dans ce cas de la mafia et de toute Institution
Faut pas nous chambrer
C’est de te plomber
Si ça a bien marché avec Lumumbé
Si ça a bien marché avec Lumumba
Ce poème nécessite
Bien sûr comme tout digne fils de pute
Sa chute
Nous l’avions annoncée elle sera subite
Et c’est donc encore une fois en forme abrupte
Qu’il vous laissera vieux Communards sur la butte
Je suis tombé par terre...
Élégie aux âmes mortes de la Cinquième République
’Aujourd’hui, j’ai plus les mains sales
J’ai plus personne pour me faire du mal’
(Alain Bashung, ’Station-Service’)
Aujourd’hui ô ma Muse
Je veux que tu m’amuses
Et que tu m’inspires
Pour le mieux ou pour le pire
À chanter
Le chant des âmes mortes
Et sur ton chantier
Faire bien forte
L’aubade
Sinistre mais vraie
Qu’ici je mettrai
Au pieds du peuple maussade
Pour qu’il se divertisse un peu
Aide-moi donc je t’en prie si tu le peux
De Laurent Wauquiez
Je veux conter la geste
Qui bien qu’à peine digérée
Vous le saviez
Ne consiste qu’en un mot dont peste
Il n’a pu se glorifier
Plus que d’un César
C’est celle d’un administrateur
Qui aurait mal lu le livre de comptes et trop tard
Se rend compte de son erreur
Je raconterai ici la brève vie
De son esprit
Mort dans l’oeuf d’une décharge électriiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii
Sa grandeur
Et sa déchéance
Je le décrirai en chausses qui montrent ses valeurs
Et comme de Monsieur Jourdain j’en citerai la prose et l’élégance
J’écris donc ce jour l’histoire
Sans secret et sans fard
D’un jeune homme de bonne famille
Élevé en ville
Précisément fils d’une mère
Qui en était la maire
Et d’un riche industriel
Directeur d’Indosuez dans l’onde septentrionale
Adoubé donc dans son berceau
Thor au marteau
Et Fils du Vainqueur des Sept Boeufs
Ce qui le fit Maître d’un destin heureux
Né des Lumières
Il en écrira un volume
Ce qui on ne sait trop comment
Le système a des mystères vraiment
Mais il semble que sa plume
Le lança comme un ion vers les ministères
À vingt ans on dit qu’il fut reconnu entre mille
Pour son talent et se gagne habile
L’estime du ministre des affaires sociales
Qui sous son aile fera prendre de la voile
si l’on me permet la métaphore d’ironie collatérale
À notre progéniture de propriétaires de chantier naval
(’Créateurs de grandes séries de voiliers qui ont marqué l’histoire
de la plaisance internationale’)
Méritoire
Est notre histoire
Mais digne si l’on m’en veut bien croire
De notre imberbe héros
Vite disciple de Clio
Major de la promotion Mandela
Maître de Requêtes au Conseil d’État
On n’oubliera pas de mentionner je crois
Que la charge prestigieuse
De maîtres des requêtes ordinaires de l’hôtel du Roi
Est aussi extrêmement coûteuse
Ni si l’on me permet la référence je le sais oiseuse
Mais Chambon-sur-Lignon
Fief de la maman de notre mignon
Est en Haute-loire à l’instar d’Yssingeaux
Où accessoirement me dira-t-on
Naquit le sien Dante
Ou comme ce soit qu’on le plante
C’est-à-dire le mentionné ministre Jacques Barrot
Fils lui-même de Noël Barrot
Qu’il remplace dès sa mort à l’Assemblée nationale
Nommé député alors qu’il n’était jusque-là que conseiller municipal
Où me demanderont les sots
Je répondrai que bien-sûr dans sa ville natale
Dont il serait postérieurement élu comme heureux maire
À l’instar de tous les hommes de sa classe
Il aura dérivé en clair
En trente ans c’est long de carrière
De places en places
Du centre droit de Raymond Barre
À l’axe de gauche démocrate de Michel Rocard
Des ministères du Commerce et de la Santé et la Sécurité sociale
À celui des Affaires Sociales
Accusé et condamné pour recel d’abus de confiance
Aux côtés de Pierre Méhaignerie et de Bernard Bosson
C’est aussi en toute confiance
Qu’il sera amnistié parce que la malversation
Était antérieure à la loi qui nous dit que faire mal
N’est ni bien ni bon
Ce qui prouve amis et collègues que la morale
Comme l’essence
Est consécutive à l’existence
Mais foin de farce ou de défiance
Envers nos belles et bonnes institutions
Au cas plutôt de son action
Dans l’assomption
De son jeune protégé nous revenons
Et voilà qu’ici je me rends compte le croira-t-on
Que le ministre est aussi
vice-président du Cercle de l’Industrie
et qu’à son jeune émule il abandonna la députation
pour de la Haute-Loire la Première circonscription
étant nommé Jacques Barrot
Vice-président de l’Européenne Commission
Présidée par José Manuel Barroso
Ouvrant ainsi la voie royale
Au fils des chantiers navals
Secrétaire d’État à trente ans
Ministre à trente-cinq ans
On ne peut pas parler d’une carrière fulgurante
Mais elle est toujours plus brillante
Que celle d’un autre licencié en histoire
Qui décida un froid soir
De mars à Nanterre
De ne plus revoir
Sur cette terre
Le soleil diurne
Dont résonne encore Richard Durn
Le nom
Comme celui du loup entre les moutons
Évidemment c’est là
Que l’histoire
Des deux gars
Se rapproche et se reserre
Puisque l’un ’apparatchik inamovible’
Et l’autre RMIste invisible
Avaient bien le même âge
Lorsque l’un à trente-quatre ans
Décide de s’abandonner à sa rage
Et que la sage
République engage
L’autre comme ministre à trente-cinq ans
On me dira bonnes gens
Que la similitude s’arrête là
Et que j’exagère la ressemblance
Entre deux enfances
Ou deux adolescences
Mais j’irais plus loin
Si vous le voulez bien
Et me donnez un peu de temps
Écoutez-moi
Durn était licencié je l’ai dit en histoire
Wauquiez est agrégé en histoire
Durn fit une maîtrise en sciences politiques
Wauquiez se diplôme de l’Institut d’Études Politiques
Durn essaie de se libérer par le théâtre
Wauquiez embrasse la scène politique
L’un pourtant sera porté vers le désastre
Alors que l’autre recevra les plus hauts titres
De la République
Évidemment des journaux les deux feront leurs gros titres
Durn naquit sans être attendu
De la rencontre fortuite
Avec un inconnu d’une mère immigrée
Qui n’en voulait pas
De la naissance de son fils
Qu’elle n’arriva pas à se faire avorter
Elle dit une fois qu’il fut mort
Je savais que ça me porterait malheur
Wauquiez dans les draps d’or tendus
D’une famille instruite
Naquit par la magie des dieux le gré
Maman en haut et papa en bas
Favorisèrent leur fils
Auquel les fées ont apporté
Le domaine d’une ville pour fort
Et l’argent d’une entreprise comme facteur et premier moteur
Alors que la vie de Durn fut un malentendu
Celle de Wauquiez depuis toujours fut entendue
Là où Durn voulut mourir dans des villes détruites
Depuis toujours l’autre eut la route du succès toute construite
Malgré sa formation le premier ne put de la vie franchir les degrés
L’autre en revanche qui n’eut pas à s’intégrer
N’a qu’à lever le pied sur le dos des laquets qui le hissent
Alors que Durn n’eut comme génie de sa lampe que le maudit démon des RMIstes
L’un de succès réconforté
L’autre qui à personne n’importait
Durn sans mère élevé par sa soeur
Wauquiez simplement soulevé par la familiale splendeur
Nous avons donc ici deux figures suspendues
Un dieu romain au joues roses et au cul tendu
Et un mesquin solitaire apeuré par l’envie qui l’habite
Pécheur et coupable de vouloir dans la vitrine les merveilles confites
Français fils de slovaque ironiquement Durn devra s’émigrer
Pour chercher au Kosovo un rapport aux autres
Auquel se consacrer
Mais là encore trop opaque était la vitre de ses hôtes
Il cherchait là sa propre mort
Il l’a trouvé mais spirituelle
Ce que les bombes ne lui donnèrent pas
L’indifférence générale
Si
Il cherchait à se faire exploser le corps
D’un coup de grisou ou de manivelle
Il n’a même pas connu la paix de trépas
Indifférente aussi à son chemin fatal
La belle amie
Finalement pour lui Je ne fut qu’un Autre
Pour Wauquiez apparemment aussi si l’on en croit l’anecdote
Autre ironie encore c’est dans le combat humanitaire
En Ex-Yougoslavie chez les Verts
Puis comme trésorier de la Ligue des droits de l’homme de Nanterre
Que Durn terminera de se décevoir
De la vie et à perdre tout espoir
Il a lutté comme il dit
Toutes ces activités et fonctions,
en plus des actions bénévoles
effectuées auparavant,
ne m’ont assuré aucune intégration
sociale.
J’avais projeté de tuer ces gens
à d’autres conseils municipaux précédents,
mais j’avais encore des garde-fous
moraux et des inhibitions
Je ne voyais pas comment changer le cours des choses
même si j’avais le choix et que j’aurais dû lutter comme un fou
pour la vie
J’ai lutté pendant de nombreuses années contre ce projet,
mais n’étant rien socialement,
n’ayant plus d’ami proche, ni de famille,
ni ne me battant jusqu’au bout
pour des causes
auxquelles je devais croire,
j’ai compris
que je n’avais plus ma place nulle part
Voici
Notre Raskolnikov
Notre héros d’une modernité inhumaine
Et d’autre part l’autre maillon de la chaîne
Voilà notre Pirogov
Extrême superbe et intransigeant
Comme tout bel imbécile si l’on veut mon avis
Qui sort de son gant
Et bien oui
Comme tout idiot bien nourri
La phrase du jour et s’en réjouit
Il faut bien le dire
Au fond n’est-il pas plus ou moins le produit
De son éducation et celle-ci
Ne fut rien d’autre qu’une comédie
Ses diplômes ne devaient pas le rendre intelligent
Regardez ses yeux vides
Deux orbites
Plus folles que celles de veaux
Lorsqu’ils ne comprennent rien
Panses avide
Que mâchent le près qu’ils habitent
Sans un mot
Ils ruminent c’est leur fin
Parasites
Des terres où ils résident
Animaux
Plus français que nous ont dit d’aucuns
Regardez ses deux yeux ouverts en grand
Comme le nouveau-né
Énormes comme le ventre du capital
Immenses comme les galaxies qu’ils ne voient pas
Car Wauquiez est comme la bête et le bébé
Sa pensée pas encore formée est sidérale
Trou noir dans le néant
Et si tu le regardes attentivement
Tu le vois
Puiné
De tous descendant
Il ne procrée que par le ventre l’esprit ça ne lui donne pas
Hébété A-B-A-B-B
Ses concepts sont bancals
Son âme asociale
Son éducation ne fut rien d’autre qu’une comédie
Ses diplômes ne devaient pas le rendre intelligent
Non il était prévu qu’il gagne sa vie
En ne rien faisant
Donc par là se déduit
Qu’il n’avait pas besoin d’être intelligent
Cela autre été de trop il devait être servile
Et servile il s’écrie
Du haut de son ministère récemment acquis
Du haut de ses trente-cinq ans qui n’en valent pas dix
Mais qu’espérer de lui
S’il n’a rien vécu il n’est pas pubère il n’est que juvénile
Son teint frais son air parfaitement satisfait
Regardez ses yeux
Ses yeux vides et absolus comme des gouffres géants de noirs cieux
Son embompoint qui en tout s’oppose aux traits
Masculins et asymétriques des Durn inquiets
À l’esprit agile
Comme il n’a pas vécu
De rien il n’est déçu
Alors que Durn trop ami des hommes
Les cherchent mais bêtes fauves
Ils ne le firent pas pénétrer dans leur alcôve
Wauquiez insensible clown
Des parents insipide clone
N’a jamais aimé que lui si Dieu l’avait fait Adam
Faute d’imagination ou narcissique pédant
Il n’aurait jamais partagé la pomme
Voici donc enfin
Puisqu’il faut bien la dire l’énormité
D’un esprit gros qui se croit fin
D’un inutile
Qui n’a jamais eu faim
D’un politique enfin
C’est-à-dire pour ceux qui en doutent c’est facile
D’une personne qui n’a aucun mérite ni aucune faculté
Qui pour cela n’a pu que se créer comme le kangourou
Sur l’illustre bosse de sa famille
Et qui n’a su s’ouvrir la voie dans la vie
Que comme le coucou
Sur les oeufs des autres
Ceux qui travaillent et qui suent
Aient-ils ou non la chance d’avoir un emploi stable ou autre
De ceux qui connaissent la peur et le doute
L’angoisse du lendemain
Mais que peut-on attendre de notre fils à maman
Qui au bain
Attend encore la main
Qui lui lavera l’entre-jambe et le pan-pan
Le ’cancer de l’assistanat’
Bien-sûr cela nous ferait rire si
Ce n’était pas
L’affirmation
De Wauquiez celle d’un récemment
Secrétaire d’État
Chargé de l’Emploi
Et Ministre en charge des Affaires Européennes
Si ce n’était pas celle d’un fils-à-papa
Qui n’a jamais travaillé car disons-le à l’antenne
À la chaîne
À l’ancienne
De déplaire sous peine
Être politien ou politienne
Comme maman
Travailler ce n’est pas
Ce n’est que vivre de l’argent public
Donnez-donc des cours d’histoire
si c’est que vous avez retenu quelques leçons
et pouvez comprendre quelque chose sans un Maître de rhétorique
Ou un lecteur pour vous lire à voix haute ce que vous ne pouvez voir
Travaillez au moins cinq heures par semaine
Si cela ne vous donne pas d’ampoules sur les mains
Mais le hic
C’est que le travail salit et cela le ministre n’en veut pas
Maman lui a mis sa belle chemise et papa lui a attaché les lacets
Il doit se porter bien
S’il se tache
À la tâche
Après Concepción
Doit le laver
Et elle se fâche
Mais je ne porterai au fond pas de jugement
Chacun sa vie
Chacun son idée de ce qu’il dit
Et quand il ment
Citons
Simplement
La page trois de la Préface
De Ladislas Mickiewicz
Aux Mélanges Posthumes d’Adam Mickiewicz
... quand l’Etat paie, la scène est ennuyeuse
comme une feuille officielle ou officieuse ;
quand la direction vit du public,
elle flatte ses goûts
et ses appétits
pour faire recette ;
et il n’est pas rare
(C’est une tare)
qu’elle lui dore et glorifie ses vices,
pour faire fortune.
Le jour où les classes supérieures
seront saisies d’un réel amour
du bien public,
elles inaugureront,...
Mais pourquoi continuer
Si nous savons
Tous sauf ceux qui vivent sur la lune
C’est triste
Mais que cela n’arrivera jamais